SOLOVIEV VLADIMIR (1853-1900)
C'est avec Soloviev que la tradition spirituelle russe élabore pour la première fois une conception du monde où la rationalité occidentale et la contemplation orientale s'intègrent en une synthèse de la science, de la philosophie et de la religion. L'homme lui-même unissait sagesse et modernité : gratifié de visions prophétiques, pèlerin sans demeure permanente, d'une rayonnante bonté, mais aussi passionné pour tout savoir, et tourmenté, sarcastique. Philosophe, poète, penseur engagé, il laisse une œuvre immense, féconde bien au-delà du système qu'elle a ébauché puis détruit. Soloviev anticipe l'œcuménisme, met en valeur la dimension féminine et cosmique de l'être, il annonce un divino-humanisme. Son influence a nourri non seulement la philosophie religieuse, mais aussi la poésie russe, le symbolisme d'Alexandre Blok et d'Andrei Biely, la création dépouillée d'Ossip Mandelstam, en pleine période soviétique.
Une carrière interrompue
Vladimir Soloviev est né à Moscou. Son père était un historien célèbre, lui-même originaire d'une famille ecclésiastique. À neuf ans, l'enfant eut la vision d'une femme « inondée d'azur doré », dans laquelle il reconnut plus tard la Sagesse divine, la Sophia. À treize ans, il entra dans une période d'athéisme violent dont il sortit à dix-huit avec une foi désormais inébranlable. Après des études universitaires en sciences et en philosophie, qu'il tint à compléter à l'Académie de théologie, il s'affirma à vingt et un ans comme un philosophe de génie. S'il puise largement dans l'idéalisme allemand, surtout dans la dernière pensée de Schelling, il se distingue par son sens du Dieu vivant, son ouverture au concret de l'histoire, son intérêt pour la spiritualité de l'Inde, du néo-platonisme et de la kabbale. En 1875, tandis qu'il étudie celle-ci à la bibliothèque du British Museum, un appel intérieur le jette en Égypte où il connaît, dans le désert, une nouvelle rencontre avec la Sophia.
Mais Soloviev est aussi un penseur engagé et, en 1881, il compromet définitivement sa carrière universitaire en demandant publiquement la grâce des assassins d'Alexandre II.
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Écrit par
- Olivier CLÉMENT : agrégé de l'Université, professeur à l'Institut Saint-Serge de Paris
Classification
Autres références
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SYMBOLISME - Littérature
- Écrit par Pierre CITTI
- 11 859 mots
- 4 médias
...émotions nationales sa découverte du symbolisme. Plus tard, Alexandre Blok place Les Cantiques de la belle dame sous le signe et de Vladimir Sergueievitch Soloviev (1853-1900), prophète passionné, et contradictoire, de la destinée religieuse de la Russie, et du symboliste Brioussov. Altération du cosmopolitisme...