GIAP VÔ NGUYÊN (1911-2013)
Du politique au militaire
Quand, le 22 décembre 1944, l'Armée populaire est officiellement formée, Giap exerce des fonctions de commandement général, tandis que le commandement opérationnel est confié à Hoang Sam. L'objectif n'était pas tant de former une armée régulière que d'armer les masses révolutionnaires et de leur offrir une éducation militaire. En d'autres termes, le parti juge que le moment est venu de passer à l'action de guérilla, compte tenu de la situation propre du mouvement révolutionnaire dans la province de Cao Bang et, plus généralement, sur la scène internationale. L'ossature des forces armées est constituée par les unités de propagande armée instaurées par Giap. L'objectif principal n'est pas la conquête militaire, mais le regroupement, autour des infrastructures politico-militaires du Viêt-minh, des organisations de mobilisation des masses, de l'échelon du village à celui de la province. Il s'agit d'unir les forces de la nation vietnamienne sous la même bannière. Pour reprendre les termes de Hô Chi Minh, le secret du succès de la révolution vietnamienne dépendra de son degré d'unité. Dans ce contexte, en se voyant confier le portefeuille de l'Intérieur au lendemain de la révolution d'août 1945, Giap est un homme politique de tout premier plan avant même d'être un soldat, dans un pays ravagé par la famine. Le jour de la proclamation de l'indépendance, le 2 septembre 1945, il confirme cette impression au côté de Hô Chi Minh quand il prononce un long discours relatif aux problèmes politiques et économiques du pays. Ses difficultés à faire face à la situation font que, bien qu'élu avec 90 p. 100 des voix dans sa circonscription en janvier 1946, il n'est pas reconduit dans ses fonctions gouvernementales mais prend en échange la présidence du conseil militaire. Dès cette époque, Giap pense que seul le recours à la force permettra d'obtenir l'indépendance, mais il n'en participe pas moins aux pourparlers franco-vietnamiens et dirige même la délégation du Viêt-minh, le 18 avril 1946, lors de la conférence de Dalat. Pendant l'ultime séjour de Hô Chi Minh en France, de juin à octobre 1946, il assume de facto la direction du pays. Au cours de cette première année de pouvoir, Giap s'est forgé une image d'homme brutal et doctrinaire. Mis en cause lors de la liquidation du parti nationaliste Viet Nam Quoc Dan Dang (V.N.Q.D.D.) et de ses militants, Giap apparaît comme un homme froid, énergique et déterminé, ce qui lui vaudra le surnom de Nui Lua (le Volcan sous la neige). Certains voient dans ses drames familiaux – son épouse est décédée lors de son incarcération dans la prison centrale française de Hanoi et sa belle-sœur, une révolutionnaire formée en U.R.S.S., fut fusillée – l'une des sources du caractère trempé de Giap.
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Écrit par
- Christian LECHERVY : enseignant à l'Institut national des langues et civilisations orientales
Classification
Médias
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