VODOU ou VAUDOU
Religion africaine qui reste implantée notamment dans l'ancien Dahomey et au Togo, le vodou (ou vaudou) s'est, de la même façon que d'autres cultes qu'on retrouve aujourd'hui en Amérique, transporté, avec les migrations d'esclaves et au prix de certaines transformations, jusqu'en Haïti.
Folklore pour les uns, ensemble de superstitions pour les autres, le vodou haïtien a été regardé la plupart du temps comme un héritage africain en voie de disparition. Qu'il ait pu survivre en dépit de tous les préjugés et de toutes les persécutions, seule l'histoire des hommes concrets qui le vivent peut aider à le comprendre. Que représente-t-il dans la société haïtienne où il est le plus développé ? Comment peut-on cerner son originalité propre ?
Le vodou africain
Le terme vodu (vodou), ou vodun, désigne au Dahomey (devenu la république du Bénin) et au Togo les dieux ou les puissances invisibles que les hommes essaient de se concilier, individuellement ou collectivement, pour s'assurer une vie heureuse. Le terme yoruba correspondant est oriṣa. On peut considérer que le système religieux qui prévaut du Nigeria au Togo, chez les Yoruba, les Fon et les Ewe, est à peu près semblable, bien que les variantes locales soient multiples. Le terme vodu peut s'appliquer à des ancêtres divinisés (notamment dans les familles royales), mais son acception la plus courante renvoie aux forces de la nature telles que la terre, la mer ou la foudre.
Souvent sont réunies sous une même appellation (Hevieso, dieu de la Foudre ; Sapata, dieu de la Terre) des familles de dieux aux compétences et aux pouvoirs parfois redondants, parfois contrastés. Les dieux se présentent différemment selon les contextes politiques. C'est ainsi qu'au Dahomey il y a eu parfois de véritables luttes d'influence entre les vodu de la famille royale et ceux des grands cultes publics. Le prestige attaché à la fonction de prêtre varie, lui aussi, d'une région et d'une époque à une autre.
S'ils symbolisent des puissances impersonnelles et jouent, par exemple, un rôle important dans la prévention ou le traitement des maladies ou des épidémies, les vodu sont rassemblés dans un panthéon qui n'est pas sans évoquer à plusieurs égards celui de l'Antiquité grecque : par les fonctions exercées et les puissances représentées, d'une part (Hevieso est le dieu du Ciel et de la Foudre ; Sapata celui de la Terre ; Legba remplit toutes les fonctions et les rôles parfois contradictoires d'Hermès) ; d'autre part, et surtout, par la logique structurale à laquelle ils semblent obéir. Comme les dieux étudiés par Jean-Pierre Vernant (Mythe et pensée chez les Grecs, 1965 ; Mythe et tragédie en Grèce ancienne, 1972), les vodu du golfe du Bénin sont « des puissances, non des personnes », et présentent quelques caractères remarquables : existence de couples divins, ambiguïté de chaque figure divine, impersonnalité et existence indifféremment singulière ou plurielle des dieux.
Ils fournissaient ainsi une matière privilégiée aux élaborations syncrétiques qui ont vu le jour à Haïti et au Brésil. Mais, bien que certains dieux, certains rituels et certains symboles aient franchi sans dommage l'Océan, témoignant ainsi de l'admirable mémoire des hommes, on ne doit pas confondre les manifestations rituelles du « vodou » brésilien ou haïtien avec les vodu des religions africaines, dieux qui témoignent au contraire d'une remarquable résistance à toutes les formes d'inspiration syncrétique.
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Écrit par
- Marc AUGÉ : président de l'École des hautes études en sciences sociales
- Laënnec HURBON : docteur en théologie, docteur en sociologie, chargé de recherche au C.N.R.S (section sociologie)
- Encyclopædia Universalis : services rédactionnels de l'Encyclopædia Universalis
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