SCHLÖNDORFF VOLKER (1939- )
Accompagnant l'évolution du cinéma allemand depuis le milieu des années 1960, Volker Schlöndorff est l'un des (rares) « passeurs » du cinéma entre la France et l'Allemagne ; il est aussi un authentique représentant du cinéma d'auteur, et ne s'est jamais désintéressé des conditions de la production. À ce titre, il s'est engagé à plusieurs reprises pour demander un renforcement du cinéma européen.
Né à Wiesbaden en 1939, c'est à la France, où il a fait ses études secondaires, que Volker Schlöndorff doit son apprentissage du cinéma, comme assistant-réalisateur de cinéastes aussi essentiels que Jean-Pierre Melville, Alain Resnais, Louis Malle – ce dernier pour quatre films (1960-1965). C'est d'ailleurs Louis Malle qui l'encouragea, moralement et financièrement, à réaliser à vingt-six ans son premier film : Les Désarrois de l'élève Toerless (1966), d'après le roman de Robert Musil. Témoignant d'une grande maturité, et ordonnant forme classique et profondeur psychologique selon un tempo narratif personnel, le film obtient le prix de la Critique au festival de Cannes en 1966. Schlöndorff incarne alors le renouveau du cinéma allemand, avec Alexander Kluge et quelques autres.
Son goût prononcé pour l'adaptation littéraire est un des aspects les plus visibles de son œuvre, et peut induire en erreur. Car Le Coup de grâce (1976), d'après le roman de Marguerite Yourcenar, et Le Tambour (1979), d'après celui de Günter Grass, sont aussi de grandes réussites cinématographiques. Le Tamboura obtenu, la même année, la palme d'or à Cannes et l'oscar du meilleur film étranger à Hollywood, fait exceptionnel qui n'a pas été sans ouvrir bien des portes au cinéaste, sans que, pourtant, il désire accéder à la grande production marchande de l'époque. Fidèle à l'un des principes du jeune cinéma allemand, il est le producteur de ses films, avec généralement des coproducteurs – souvent français – presque toujours venus de la télévision.
Son portrait en « jeune cinéaste » se caractérise donc par son non-conformisme, son souci de l'indépendance, et sa modernité. D'où un téléfilm d'après une pièce de jeunesse de Brecht, Baal (1969) – dont l'acteur principal était R. W. Fassbinder –, des films influencés par le mouvement féministe comme Feu de paille (1972), deux œuvres prenant le contre-pied de la tradition bien allemande du Heimatfilm, c'est-à-dire des bluettes sentimentales et conservatrices idéalisant le monde rural : Michael Kohlaas (1969), d'après H. von Kleist, et et La Soudaine Richesse des pauvres gens de Kombach (1970), où Schlöndorff subvertit le genre en mettant à nu conflits de classe et arrière-plan historique. Rien de schématique, ni de dogmatique dans ses films, bien que parfois il ait souhaité « servir » certaines causes. C'est le cas avec L'Honneur perdu de Katharina Blum (1975), écrit et réalisé avec celle qui était alors son épouse, Margarethe von Trotta, vigoureuse dénonciation de la presse à scandales tirée d'un récit de Heinrich Böll dont l'adaptation prend ici la forme – avec l'accord de l'écrivain – d'un thriller politique.
Aux environs de 1980, Schlöndorff prend l'initiative, avec Alexander Kluge, d'une série de films réalisés collectivement : documentaires militants, témoignages précieux sur l'état de l'Allemagne fédérale à l'époque. Le plus connu est L'Allemagne en automne (1978), où une dizaine d'auteurs (dont Fassbinder, Böll, Reitz, et bien sûr Schlöndorff et Kluge, responsables des séquences de reportage) témoignent sur l'ambiance du pays à l'époque du groupe Baader-Meinhof.
Le film de fiction qu'il réalise au cours de cette période, Le Faussaire d'après[...]
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Écrit par
- Daniel SAUVAGET : économiste, critique de cinéma
Classification
Autres références
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Volker Schlöndorff est né dans une famille de médecins en 1939 à Wiesbaden, dans le Land de la Hesse en Allemagne, mais il a fait ses études en France où il se rend dès l'âge de quinze ans. Il intègre l'I.D.H.E.C. puis devient l'assistant de grands réalisateurs français comme ...
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