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VOLPONE, Ben Jonson Fiche de lecture

Volpone ou le renard, joué pour la première fois en 1606, est l'une des comédies les plus brillantes de Ben Jonson (1572-1637), poète et dramaturge dont la réputation fut équivalente à celle de Shakespeare en son temps. Il s'agit de sa comédie peut-être la plus exubérante, où il donne libre cours à son génie satirique pour montrer les effets de la soif de l'argent, et notamment la perversion des relations entre les individus. En 1928, adaptée par Jules Romains et Stefan Zweig, la pièce connut un grand succès auprès du public français, Volpone y prenant les traits de Charles Dullin. Suivit en 1939 une version cinématographique par les soins de Maurice Tourneur, avec Harry Baur dans le rôle titre et Louis Jouvet.

Le renard et la mouche

L'intrigue, héritée de l'antique (Lucien, Pétrone), est très complexe, bien qu'elle respecte les unités de lieu et de temps. Elle tourne principalement autour des manigances d'un riche Magnifique de Venise, Volpone (« le renard ») qui, secondé par son serviteur Mosca (« la mouche »), s'emploie à accroître sa fortune considérable en exploitant la cupidité des autres. Une intrigue secondaire concerne le ridicule chevalier anglais Sir Politic Would-be, obsédé par l'idée de complot, et sa femme : tous deux, par leur folie propre, offrent un reflet de la décadence de la société vénitienne dont ils cherchent à singer les manies. Dans cette comédie – farce douce amère, tel est pris qui croyait prendre : tous sont dupés par Volpone. Mais Volpone l'est à son tour par Mosca, et tous deux par les autorités. Au final, la fable tourne à l'aigre, dans une société universellement corrompue où l'autorité de Venise apparaît marquée par les mêmes vices que les individus qu'elle est censée corriger.

La pièce s'ouvre sur un hymne cynique de Volpone à l'or, nouvel astre solaire, qui devient par la verve jubilatoire du discours la mesure de toute chose : « Les poètes ont fait sagement de nommer/ De ton nom glorieux le siècle le meilleur,/ Toi qui surpasses tout, qui nous offres des joies/ Près desquelles toute autre, enfants, parents, amis/ Tout ce qu'on peut rêver sur la terre, n'est rien ! » (I, i) L'acte I montre alors comment Volpone a imaginé de se faire passer pour mourant afin de faire affluer autour de lui des courtisans qui le couvrent de présents dans l'espoir d'hériter de sa fortune : tel lui apporte un plat en argent, tel autre une bourse bien garnie, tel autre encore un diamant. Mais Volpone exige des plaisirs plus charnels : avec l'aide du rusé Mosca, il amène le jeune marchand Corvino (« le jeune corbeau ») à lui offrir les faveurs de sa propre femme, dont il est pourtant férocement jaloux, en lui laissant entendre qu'il ne l'oubliera pas dans son testament et que, au seuil de la mort, il ne saurait d'ailleurs guère faire de mal à la belle Célia. C'est l'occasion pour Jonson de mettre en scène la bassesse du mari s'ingéniant à convaincre sa femme de se prostituer, dans l'espoir d'en tirer une récompense illusoire.

Dans une autre scène, Mosca et Volpone parviennent à persuader un autre courtisan, Corbaccio (« le vieux corbeau »), de coucher Volpone sur son propre testament, à charge de revanche – ce que le vieillard, persuadé que Volpone est à l'article de la mort, s'empresse de faire, déshéritant ainsi son propre fils.

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Écrit par

  • : agrégée d'anglais, ancienne élève de l'École normale supérieure de Fontenay-Saint-Cloud, maître de conférences à l'université de Paris-VIII-Saint-Denis

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