KARADŽIĆ VUK STEFANOVIĆ (1787-1864)
Une œuvre variée
L'idée d'un alphabet phonétique date du Moyen Âge. En effet, chez des seigneurs féodaux serbes, on remarque déjà les premières tendances de simplifications orthographiques dans l'écriture. La règle de conduite de Vuk était : « Écris comme tu parles, lis comme il est écrit. » Chaque son pour sa désignation ne peut avoir qu'un signe graphique ou une lettre. L'alphabet du vieux slave qui contenait quarante-quatre signes est réduit. Vuk introduit le j de l'alphabet latin, simplifie l'orthographe de quatre lettres, complète et crée finalement l'alphabet actuel de trente lettres. C'est l'un des alphabets les plus perfectionnés du monde.
À la suite de la révolution française de 1848, Karadžić disait des héros français : « Ce sont les insurgés les plus sincères qui ne craignent personne et contre qui personne ne peut rien, car ils viennent de Dieu : c'est-à-dire, ils sont le temps et l'esprit du temps. » Vuk, révolutionnaire, vise l'éveil politique de son peuple à travers les insurrections ainsi que l'éveil spirituel par les livres : la création d'une langue nationale et d'une nouvelle orthographe. Pour lui, les deux formes révolutionnaires doivent aboutir à deux formes de la même liberté.
La devise qui guide ses ouvrages historiques est empruntée à Karamzine, historien russe : « L'histoire n'est pas un roman, ni le monde un jardin dans lequel tout doit être agréable : elle peint le monde réel. » La grande amitié entre Vuk et l'historien allemand Leopold von Ranke a porté son fruit : un ouvrage magnifique intitulé Die serbische Revolution (La Révolution serbe, 1829). Le réalisme, le soin de s'intéresser toujours à l'essentiel, au sujet même, à des facteurs révélateurs, sont les traits qui distinguent parmi d'autres Montenegro und die Montenegriner (Monténégro et les Monténégrins, 1837). Une image réaliste des rapports sociaux dans la vie tribale, patriarcale et primitive ainsi que le caractère et la psychologie des Monténégrins s'en dégagent.
À part bon nombre de recueils de Chants populaires serbes à l'aide desquels Vuk intronise l'esprit poétique de son peuple, il importe de retenir le Dictionnaire de la langue serbe qui met en valeur la richesse lexicographique de la langue populaire.
Les fondements de la langue serbo-croate littéraire sont posés dans la traduction du Nouveau Testament que Karadžić donne en 1847. Il n'ignorait pas que les traductions de la Bible contribuent au rapprochement des peuples séparés par les différences linguistiques et favorisent, par la conscience religieuse commune, l'unité spirituelle de l'humanité. Pismenica, la Grammaire de la langue serbo-croate, et le recueil des Contes populaires serbes complètent son œuvre.
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Écrit par
- Zoran STEVANOVIC : licencié ès lettres, professeur à l'Alliance française
Classification
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