WALAFRID STRABON ou WALAFRID LE LOUCHE (808 env.-849)
Moine à Reichenau, élève de Raban Maur à Fulda (826-829), Walafrid est appelé par Hilduin en 829 pour être le précepteur du fils de Louis le Pieux, qui le nomme abbé de Reichenau en 838 ; expulsé de son abbaye pour sa fidélité à Lothaire dans la lutte des trois fils de Louis, il se réconcilie avec Louis le Germanique au moment du traité de Verdun (843), revient à Reichenau et meurt au bord de la Loire, lors d'une mission diplomatique auprès de Charles le Chauve. La tradition lui attribuait l'immense Glose ordinaire (Glossa ordinaria), commentaire suivi, marginal et interlinéaire de chacun des livres de la Bible : il faut en rabattre. La Glose a été mise en ordre au xiie siècle (à partir d'éléments qui peuvent remonter au ixe) par Anselme de Laon et répandue comme manuel par Pierre Lombard pour faire pendant en matière d'exégèse au Livre des sentences dans la théologie. Il reste peu de l'exégèse de Walafrid, peut-être un commentaire des Psaumes. Plus originaux sont les Origines et développements de quelques usages de l'Église (De quarumdam ecclesiasticarum rerum exordiis et incrementis, 841) : avec un remarquable souci historique, il explique où, quand et pourquoi on a adopté tel rite, utilisé tel objet dans le culte. Comme moine, il eut à écrire ou récrire la vie de quelques grands personnages : il abrège la Vie de Charlemagne d'Eginhard, écrit la vie de saint Mammas de Césarée, de saint Gall, de saint Blaitmaic ; il a laissé des petits poèmes de cour dont Le Jardinet (Hortulus), pièce de 144 hexamètres dédiée à l'impératrice Judith, où il décrit son jardin avec verve et précision, des épigrammes, des inscriptions, des épîtres dont une, en hexamètres, à son ami Godchau de Fulda. Mettons à part la Vision de Hatton (Visio Wettini, 835), transcription en vers d'un récit en prose de la vision supposée qu'eut Hatton de Reichenau, maître affectionné de l'auteur, devenu plus tard évêque de Bâle, qui avait visité en rêve l'enfer et le paradis : derrière la présentation littéraire, on reconnaît l'utilisation politique de l'au-delà qui permet de fustiger les vivants par l'idée du sort des morts et d'entrer dans les querelles contemporaines entre moines, clercs et laïcs.
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Écrit par
- Jean-Pierre BORDIER : agrégé de l'Université
Classification
Autres références
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MOYEN ÂGE - Le monde médiéval
- Écrit par Léopold GÉNICOT
- 12 280 mots
- 1 média
..., l'orfèvrerie, la glyptique racontent à nouveau, comme durant l'Antiquité. Des écrits exhalent un parfum bucolique, notamment l'Hortulus où Walafrid Strabon, abbé de Reichenau, sur le lac de Constance, décrit les légumes et les fleurs du « jardinet » qu'il s'était aménagé dans l'enceinte du...