WHITMAN WALT (1819-1892)
La croissance des « Feuilles d'herbe »
Whitman persévéra donc et, dès 1856, publia une deuxième édition de son recueil, plus sobre d'aspect et de petit format, mais considérablement augmentée et qui comptait non plus douze, mais vingt-deux poèmes. L'accueil ne fut guère plus chaleureux, mais peu importait à Whitman qui, descendant de Hollandais têtus par sa mère et de quakers anglais par son père, était sûr d'avoir raison contre tous. Toute sa vie fut désormais consacrée à enrichir son recueil, dont jusqu'à sa mort il publia inlassablement de nouvelles éditions. En 1860, il donna à son livre l'apparence d'une Bible, car il songeait alors à fonder une nouvelle religion. En 1867 (quatrième édition), après avoir soigné les jeunes soldats blessés dans les hôpitaux de Washington pendant la guerre civile, il ajouta à ses Feuilles d'herbe un groupe de poèmes de guerre intitulés « Roulements de tambour » (« Drum Taps ») et une « Suite aux Roulements de tambour » où il célébrait la mort de Lincoln, le président martyr. En 1871-1872, dans la cinquième édition, il introduisit entre autres un nouveau poème, « En route pour l'Inde » (« Passage to India »), où il dégageait le sens mystique de l'évolution de l'humanité.
Pour célébrer le centenaire de l'indépendance des États-Unis, il publia en 1876 une nouvelle édition, la sixième, accompagnée d'un mélange de prose et de vers intitulé Deux Ruisselets (Two Rivulets). En 1881, un éditeur de Boston, Osgood, entreprit de publier une grande édition commerciale (la septième) de ce recueil dont jusqu'alors (sauf en 1860) Whitman avait été lui-même l'éditeur. Mais Osgood, menacé de poursuites par la Société pour la répression du vice, renonça vite à l'aventure. Whitman, pour sa part, refusa de céder, trouva un autre éditeur et, pour la première fois, grâce au scandale, son livre connut le succès. Il avait déjà sa forme actuelle, car Whitman ne fit après cela qu'ajouter de nouveaux poèmes à son recueil : « Sables de mes soixante-dix ans » (« Sands at Seventy ») et « Adieu, mon imagination » (« Good-Bye My Fancy »), sans modifier le reste. Il put ainsi, en 1892, l'année même de sa mort – survenue à Camden (New Jersey) –, faire paraître la neuvième édition de ce livre avec lequel s'était peu à peu confondue sa vie.
La suite de cet article est accessible aux abonnés
- Des contenus variés, complets et fiables
- Accessible sur tous les écrans
- Pas de publicité
Déjà abonné ? Se connecter
Écrit par
- Roger ASSELINEAU : professeur de littérature américaine à l'université de Paris-Sorbonne
Classification
Média
Autres références
-
ÉTATS-UNIS D'AMÉRIQUE (Arts et culture) - La littérature
- Écrit par Marc CHÉNETIER , Rachel ERTEL , Yves-Charles GRANDJEAT , Jean-Pierre MARTIN , Pierre-Yves PÉTILLON , Bernard POLI , Claudine RAYNAUD et Jacques ROUBAUD
- 40 118 mots
- 25 médias
...certains, les œuvres de ces hommes ne portent pas assez l'empreinte de ce qu'est l'Américain, citoyen du Nouveau Monde. Hester Prynne, le capitaine Achab, Walt Whitman lui-même ne parlent pas la langue familière et irrévérencieuse qui choque tant les gentlemen anglais. Ces écrivains de la Renaissance n'ont... -
FEUILLES D'HERBE, Walt Whitman - Fiche de lecture
- Écrit par Claude-Henry du BORD
- 860 mots
- 1 média
Walt Whitman (1819-1892) est considéré comme le plus grand poète américain. De son vivant, cet anticonformiste a été célébré comme un génie ou traité d'écrivain obscène. Comme son compatriote Emerson (1803-1882), initiateur d'un mouvement philosophique, le « transcendantalisme », Whitman croit en...
-
FRAGMENT, littérature et musique
- Écrit par Daniel CHARLES et Daniel OSTER
- 9 372 mots
- 2 médias
À cet égard, on pourrait suivre Gilles Deleuze lorsqu'il voit dans l'œuvre de Whitman l'accomplissement d'une écriture fragmentaire qui a « la valeur immédiate d'une énonciation collective » (Critique et clinique). Le monde, pour l'écrivain américain, Whitman et d'autres,...