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WHITMAN WALT (1819-1892)

Le poète du cosmos

Bien que le « Chant de moi-même » domine tout le recueil, l'ensemble n'en est pas moins intitulé très impersonnellement et assez mystérieusement Feuilles d'herbe – et non brins d'herbe. Whitman a voulu jouer sur les mots et que ces « feuilles » fussent à la fois celles de son livre et celles de l'herbe, de cette herbe anonyme qui pousse en tous lieux et qui symbolise pour lui la présence universelle d'un élan vital irrésistible. Dans le monde poétique de Whitman, les moindres objets et les plus communs, du fait même qu'ils existent et sont inséparables de leur contexte cosmique, deviennent de merveilleux miracles. « La majesté et la beauté du monde sont latents dans n'importe quel iota du monde », écrit-il, et ses poèmes à tout moment le prouvent. Tout objet est à ses yeux un hiéroglyphe qu'il nous appartient de déchiffrer, car le visible n'a de sens que par l'invisible ; et l'invisible, en retour, ne peut s'exprimer que par le biais du visible. Autrement dit, Whitman pressentait déjà le symbolisme et annonçait ce que Claudel a appelé « la divine loi de l'expression détournée ».

Whitman a été, dans tous les pays, salué par les poètes d'avant-garde comme un libérateur parce qu'il a osé détruire les stéréotypes de la prosodie traditionnelle, et comme un purificateur exemplaire parce qu'il a su débarrasser la poésie de tout élément descriptif ainsi que narratif, et entrepris hardiment de dire l'indicible avec les mots de tout le monde, argot compris lorsqu'il le fallait. Il a eu pour disciples tous ceux qu'attirent son inspiration très généreusement démocratique, les poèmes où il a chanté « l'homme en masse » et l'industrie moderne qui, avec des machines dont il a célébré la beauté, a permis à l'homme de conquérir le monde.

— Roger ASSELINEAU

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Écrit par

  • : professeur de littérature américaine à l'université de Paris-Sorbonne

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Walt Whitman - crédits : Three Lions/ Hulton Archive/ Getty Images

Walt Whitman

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