FELSENSTEIN WALTER (1901-1975)
Comédien de formation, l'Autrichien Walter Felsenstein s'engage dans la mise en scène de théâtre et d'opéra dès 1926. L'essentiel de sa carrière se déroulera en Allemagne. À la tête de la Komische Oper de Berlin de 1947 à 1975, il fera de cette scène un terrain d'expérimentation en vue de la réalisation de ce qu'il a choisi d'appeler le Musiktheater.
Fondé sur l'esprit d'équipe et le jeu de l'interprète, le Musiktheater fait du chanteur un acteur à part entière, soumis aux lois du théâtre parlé. Rompant avec les traditions alors en vigueur sur la scène lyrique, les productions de Felsenstein assurent à son ensemble une réputation internationale dès les années cinquante.
De Vienne à Berlin
Walter Felsenstein, fils d'un ingénieur viennois, commence à vingt ans une carrière de comédien. Après deux ans de cours auprès d'un professeur du Burgtheater de Vienne, il est attaché à diverses scènes de la province allemande, en particulier à Lübeck et à Mannheim. Il a l'occasion de réaliser en 1926 sa première mise en scène théâtrale – La Ronde de Schnitzler – et sa première mise en scène lyrique – La Bohème de Puccini. En cinq ans, de 1927 à 1932, il monte à Fribourg-en-Brisgau et à Bâle pas moins de soixante-dix ouvrages de tout genre. Il va ensuite de Cologne (1932) à Francfort (1934) et collabore alors avec les décorateurs Otto Reigbert, Ludwig Sievert, et surtout Caspar Neher. Le succès de La Chauve-Souris montée en équipe avec ce dernier lui vaut de faire ses débuts à Berlin en décembre 1935. Frappé d'interdit par les nazis (son épouse est d'origine juive) et exclu des théâtres nationaux en 1936, il est encore toléré sur les scènes privées. Il essaie de se maintenir dans la capitale et refuse les propositions de Buenos Aires, Chicago, Philadelphie. Il ne veut travailler qu'en langue allemande, le texte étant le fondement de son activité de metteur en scène. Cela le conduit à accepter l'offre de l'opéra de Zurich pour les saisons 1938 et 1939. Mais sa rencontre avec Heinrich George oriente différemment sa carrière dès 1939.
Le comédien, responsable du Schillertheater, à Berlin, obtient pour lui une dérogation de la part des autorités nazies. Grâce à ce contrat, il renoue avec le théâtre parlé (en particulier avec Lessing, Goethe et Schiller). Au même moment, il répond aux invitations de Herbert von Karajan, pour Falstaff en 1941 à Aix-la-Chapelle, et de Clemens Krauss, pour Les Noces de Figaro en 1942 à Salzbourg. Il fait également ses premières armes au cinéma, avec Windstoss, d'après une pièce de Giovacchino Forzano, et La Pathétique, un film musical inspiré de Tchaïkovski, produit par la Tobis.
Après l'effondrement de Berlin, le célèbre metteur en scène expressionniste Karl-Heinz Martin reconstitue une troupe au Hebbeltheater ; Felsenstein est chargé de la mise en scène de La Vie parisienne en décembre 1945. Les Soviétiques, responsables de la culture pour le secteur oriental de Berlin, lui offrent aussitôt de remonter à son intention l'exMetropoltheater, pour l'heure en ruine, et de lui en confier la direction administrative et artistique. On lui donne les moyens de réunir un ensemble de trois cents personnes. Par référence à la salle Favart, l'établissement est baptisé Komische Oper.
Felsenstein avait mûri depuis longtemps sa propre conception du théâtre lyrique en tant que représentation théâtrale, et son expérience de metteur en scène peu perméable aux courants qu'il avait pu croiser n'avait fait que renforcer les convictions premières du comédien. Dès 1936, alors qu'il donnait des cours à l'École d'art dramatique de Francfort, il avait bâti un projet d'école internationale du théâtre lyrique qui, du fait de son exclusion des théâtres et de la guerre, avait échappé à une confrontation avec la réalité.[...]
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Écrit par
- Claude VAUGIER
: professeur certifié de lettres modernes, D.E.A. d'études théâtrales, correspondante de la revue
Opéra International
Classification
Média
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