SEGAL WALTER (1907-1985)

Originaire d'Ascona, dans le canton suisse du Tessin, Walter Segal a accompli un parcours assez inhabituel en s'inscrivant successivement aux écoles d'architecture de Berlin, de Delft et de Zurich. En 1936, il s'installe à Londres et il ne quittera plus la Grande-Bretagne. Après avoir participé, de 1950 à 1970, à l'essor de la construction dans ce pays, il devient très méfiant à l'égard du gigantisme et cherche une solution qui engagerait les futurs habitants d'un quartier dans le processus de construction de leurs logements. En effet, depuis ses études à Berlin où il connut Bruno Taut, l'un des inventeurs du logement social moderne, Segal s'intéressait aux problèmes de l'habitation ouvrière.

C'est dans les années 1970 qu'il conçoit ses premières maisons pour autoconstructeurs, mais il ne parvient pas à les imposer aux fortes résistances bureaucratiques. Il faudra attendre 1980 pour voir la municipalité de Lewisham, au sud-est de Londres, prendre en compte ses projets et lui permettre de les mettre à exécution à un moment où la commande publique diminue fortement dans toute l'Europe. Segal est revenu à la maison isolée, à la façon des Castors français, avec cette différence qu'ici la présence de l'architecte a été constante : chaque famille a travaillé avec lui à la définition de son programme et de son espace dans le cadre des dix-neuf variantes possibles du plan initial. À partir d'une structure en bois, des éléments industrialisés ont été fournis aux autoconstructeurs qui les ont facilement agencés. Seules les couvertures en terrasses ont été réalisées par des entreprises. L'entraide a très bien fonctionné, et les délais de réalisation ont varié de dix mois à deux ans.

Bâtisseur tenté par l'utopie, Walter Segal fut l'un des rares maîtres d'œuvre pratiquant le dialogue avec ses clients : les solutions qu'il a proposées sont du plus haut intérêt pour le relogement et la réinsertion sociale des personnes à faible revenu.

— Roger-Henri GUERRAND