KAZAN WATANABE (1793-1841)
Le rénovateur du portrait
Les portraits de Kazan occupent un premier plan dans la peinture japonaise, non qu'ils rompent avec une tradition ancestrale, mais parce qu'avec leur réalisme nouveau ils atteignent un moment d'équilibre.
Dès les hautes époques, le Japon possède une tradition du portrait ; religieuses ou rituelles, ces représentations commémoraient des moines éminents, des patriarches de sectes. Le réalisme, fort éloigné de la conception occidentale, ne s'introduisit dans cet art qu'au milieu du xiie siècle, avec les nise-e (images ressemblant à la réalité). Ici tout se ramène à une géométrie des formes fondées sur quelques lignes où la couleur n'a qu'une valeur décorative. Avec une extrême économie de moyens par une simplification hardie, le sujet est transposé et la personnalité du modèle se réfugie tout entière dans le regard.
Kazan chercha à secouer les conventions séculaires pour cerner l'homme dans toute sa densité. Si de nombreux peintres avaient déjà assimilé des principes européens comme la perspective linéaire, le clair-obscur, personne avant lui n'avait songé à appliquer le modelé au portrait traditionnel. Au trait, qui reste la base de son dessin, à la couleur, qui renforce à la fois le réalisme et l'effet décoratif, Kazan ajoute le volume. En somme, le visage est seul en cause : les contours ont la finesse d'un trait de plume, le modelé est discret, le reste se fond dans la pure tradition japonaise.
Si la qualité de ses portraits tient évidemment à cette technique élaborée, elle dépend aussi pour beaucoup de la connaissance intime qu'il avait de ses modèles : il sut en exprimer l'essence même, car il réserva son activité de portraitiste à des êtres liés avec lui par des affinités étroites.
Les recherches de Kazan fécondèrent réellement la peinture japonaise : accueillant aux leçons de l'Occident, il sut se garder de la copie et réussit à créer au sein de la tradition une originalité faite d'humanisme et de réalisme.
La suite de cet article est accessible aux abonnés
- Des contenus variés, complets et fiables
- Accessible sur tous les écrans
- Pas de publicité
Déjà abonné ? Se connecter
Écrit par
- Chantal KOZYREFF : conservatrice des collections Japon, Chine et Corée aux Musées royaux d'art et d'histoire, Bruxelles, gestionnaire des musées d'Extrême-Orient
Classification