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WATTEAU ET LA FÊTE GALANTE (exposition)

Une mémorable rétrospective au Grand Palais, à Paris, avait célébré, en 1984, le bicentenaire de la naissance d'Antoine Watteau (1684-1721). Nul anniversaire, nulle commémoration ne justifiaient Watteau et la fête galante, organisée par le musée des Beaux-Arts de Valenciennes et qui, en un peu plus de trois mois (5 mars-14 juin 2004), a obtenu un excellent écho critique et un succès public considérable, l'un et l'autre tout à fait mérités. C'est l'opportunité de la désignation de Lille comme capitale européenne de la culture pour l'année 2004 qui, par le biais de financements régionaux, a permis à la ville natale du peintre de lancer cet ambitieux projet. Thématique et non monographique, il visait à revisiter son œuvre en prenant comme axe directeur le genre devenu inséparable de son nom, la « fête galante ».

On mesure mal aujourd'hui combien la carrière des peintres était, dans la France des xviie et xviiie siècles, guidée par le système académique. L'Académie royale de peinture et de sculpture, réunissant, depuis 1648, les principaux artistes parisiens, jouait dans cette perspective un rôle capital. Lieu de formation par excellence (l'École nationale supérieure des beaux-arts en est l'héritière directe), elle ne négligeait pas les questions théoriques, abordées par le biais de conférences réunissant aussi bien les maîtres que les élèves. Elle jouissait en outre d'un véritable monopole d'exposition avec le Salon, qui, irrégulièrement sous Louis XIV et aux débuts du règne de Louis XV, puis tous les deux ans après les années 1740, donnait au public et aux critiques l'occasion de voir et de juger les productions les plus récentes de ses membres. L'appréciation des uns et des autres était en grande partie orientée, pour ce qui est de peintres, par le sujet même des œuvres, celui-ci correspondant le plus souvent au genre dans lequel les académiciens avaient été admis lors de leur élection. Ces genres correspondaient à une hiérarchie, étant entendu que ceux qui demandaient le plus d'invention ou d'imagination au peintre étaient situés au plus haut, ceux qui se contentaient de reproduire « la nature » au plus bas, la représentation de la personne humaine étant par ailleurs privilégiée par rapport à celle des choses inanimées. Tout en haut se situaient donc les « peintres d'histoire », qui traitaient les sujets religieux, la mythologie et l'histoire proprement dite, et à qui étaient réservés les postes de direction ou d'enseignement de l'Académie ; en bas, les peintres de nature morte ou de paysage ; les portraitistes et surtout les « peintres de genre », ceux qui représentaient la vie contemporaine, restant dans une zone intermédiaire.

La dénomination sous laquelle l'artiste était reçu avait donc une grande importance. Or pour Watteau, l'Académie, au lieu d'employer un des genres reconnus, créa, semble-t-il, pour lui (la question est encore débattue parmi les spécialistes), une catégorie à part, la « fête galante », correspondant au tableau présenté par le peintre pour son morceau de réception : Le Pèlerinage à l'île de Cythère (ou L'Embarquement pour Cythère, 1717), aujourd'hui au Louvre et malheureusement absent de l'exposition de Valenciennes. Ce genre de la fête galante, d'autres peintres après Watteau, tels Nicolas Lancret, Jean-Baptiste Pater ou Pierre-Antoine Quillard, allaient l'illustrer et le développer durant la première moitié du siècle. L'objet de l'exposition était d'essayer de mieux le définir, enrichissant ainsi aussi bien la connaissance même de Watteau que celle de la peinture française de son temps.

Une première salle était consacrée à Watteau, à travers un exceptionnel rassemblement de peintures, de dessins et d'estampes,[...]

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Écrit par

  • : ancien élève de l'École normale supérieure, professeur à l'université de Paris-IV-Sorbonne

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