WEEGEE ARTHUR FELLIG dit (1899-1968)
Issu d'une famille juive austro-hongroise émigrée aux États-Unis, Arthur Fellig a vécu durant sa jeunesse dans la misère des quartiers populaires de New York qu'il ne cessera de côtoyer. À quatorze ans, Arthur Fellig abandonne l'école. Afin de gagner quelques dollars, il est vendeur à la sauvette ou plongeur dans une cafétéria avant de devenir l'assistant d'un photographe commercial. Rencontre accidentelle, la photographie ne s'impose certainement pas à lui comme un art, mais plutôt comme un moyen, parmi d'autres, d'échapper à la misère. Ainsi, il est successivement photographe ambulant, puis, de 1924 à 1928, violoniste dans les théâtres où passent les films muets. De 1924 à 1935, il collabore avec l'agence de photo-reportage Acme New Picture (future U.P.I. Photos) en tant que technicien de laboratoire. Ce travail lui permet en 1930 d'acheter son premier appareil photo, un Speed Graphic 4 × 5 pouces avec flash, qui ne le quittera plus. C'est donc avec une vive sensibilité qu'il photographie durant les années 1935-1945 tous les sujets qui vont bâtir sa réputation : les tragédies de la vie nocturne new-yorkaise avec leur cortège de victimes, de survivants et de badauds. Incendies, arrestations, meurtres, faune interlope des bars, accidents de la route, clochards et enfants des rues : chaque nuit, pendant dix ans, Fellig traquera le fait-divers sensationnel.
Photographe indépendant ayant reçu le surnom de Weegee, Arthur Fellig inaugure avec succès une méthode de travail particulière qui connut par la suite nombre d'adeptes. Attaché au quartier général de police de Manhattan, il est immédiatement informé de tout événement ayant eu lieu à New York et est le premier sur les lieux. Il travaille la nuit et vend ses clichés aux agences de presse ou directement aux principaux journaux avant le bouclage de l'édition du matin. En 1938, Weegee reçoit le premier l'autorisation d'installer dans sa voiture une radio qui lui permet de suivre en direct les messages de la police et des pompiers. Afin d'être plus rapide, il va même jusqu'à installer dans le coffre un nécessaire de développement.
Les photos qu'il réalise au flash ont un caractère simple et direct et des accents de vérité qui séduisent tous les grands quotidiens de la ville. Weegee travaille vite et bien, y compris dans des conditions difficiles. Il est capable de développer ses plaques n'importe où : dans un taxi, une ambulance ou sur le plancher de la rame de métro qui l'emmène vers ses acheteurs potentiels.
Chroniqueur d'une époque troublée et d'une ville violente, il n'a (presque) qu'un seul sujet : New York. En près de cinq mille reportages, il réalise des images fortes et directes, rudes, voire brutales, à la limite d'un certain voyeurisme, qui nous présentent l'Amérique de la rue et des bas-fonds où Weegee saisit la réalité sordide qui se cache derrière le mythe. Ses photographies portent un regard critique qui prend parfois des allures de réquisitoire et elles jouent souvent un rôle de révélateur social. Mieux que tout autre, Weegee sait d'expérience que le rêve américain n'est pas à la portée de tous.
La valeur artistique du travail de Weegee est rapidement reconnue et, consécration officielle, une de ses photos est retenue par le musée d'Art moderne de la Ville de New York en 1943. En 1944, il expose en son nom puis, l'année suivante, publie son premier livre, Naked City (rééd. chez Da Capo, New York, en 1975), qui reçoit un excellent accueil. La carrière de Weegee change alors d'orientation. Il se consacre à la photo de mode pour les plus grands magazines comme Life ou Vogue, avant de s'installer à Hollywood de 1947 à 1952. Les Studios Universal tournent une adaptation de son livre qu'ils intitulent Weegee's New[...]
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Écrit par
- Marc-Emmanuel MÉLON : professeur de communication à l'Institut supérieur des sciences sociales et pédagogiques de Marcinelle, Belgique, chargé de cours à l'université de Liège
Classification
Médias
Autres références
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PHOTOGRAPHIE (art) - Un art multiple
- Écrit par Hervé LE GOFF et Jean-Claude LEMAGNY
- 10 750 mots
- 20 médias
...artifice pour crier l'irrémédiable : malheur ou bêtise, solitude et folie. Partiellement influencée par le travail de Lisette Model, elle-même marquée par le regard caustique et parfois violent de Weegee, Diane Arbus exerce une fascination intense sans guère se laisser imiter, bien que les portraits glacés...