REICH WILHELM (1897-1957)
Reich est de tous les disciples de Freud celui dont l'œuvre représente la tentative la plus aboutie de relier la psychanalyse au politique. S'il est surtout connu en tant que figure éminente du freudo-marxisme, Reich fut également un clinicien et un chercheur qui n'a cessé de remettre en question ses propres acquis. Il ne se contenta pas de travailler à une synthèse des théories freudiennes et marxistes, mais, guidé par ses convictions psychanalytiques, s'engagea activement dans l'action politique. D'abord acquis aux conceptions freudiennes, il s'en détachera peu à peu pour ne retenir que la dimension sexuelle. Par la suite, il abandonnera toute approche intersubjective pour se consacrer à l'étude objective et quantitative des forces psychiques.
L'homme et l'œuvre
Reich est né dans une famille juive de Galicie, dans l'Empire austro-hongrois. Après des études de droit commencées à la fin de la Première Guerre mondiale, il entreprend une formation médicale qu'il achève en 1922. Au cours de ses études, il découvre l'œuvre de Freud, qu'il rencontre en 1919. À l'âge de vingt et un ans, il est admis à la Société psychanalytique de Vienne. Quelques mois plus tard, il y prononce sa première communication – « Conflits de la libido et formations délirantes dans Peer Gynt d'Ibsen » – qui témoigne déjà de son intérêt pour la sexualité, tout comme son premier livre important, publié en 1927, La Génitalité dans la théorie et la thérapie des névroses, ouvrage apprécié par Freud.
À Vienne, il exerce comme psychanalyste dès 1919 et participe à la création d'un séminaire de technique psychanalytique, qu'il dirigera par la suite, au cours duquel il développera ses idées sur le caractère et l'économie sexuelle. Il épouse en 1921 Annie Pink, une de ses patientes qui, sous le nom d'Annie Reich, fera une brillante carrière de psychanalyste.
En 1930, Reich quitte Vienne pour Berlin. Trois ans plus tard, l'arrivée des nazis au pouvoir le contraint à fuir l'Allemagne et à se réfugier au Danemark où il poursuit son combat politique. Commence alors une vie d'exilé. Déclaré persona non grata au Danemark, il doit partir pour la Suède. En 1937, il publie Réflexe orgastique, attitude musculaire et expression corporelle, ouvrage dans lequel il relate les résultats de sa tentative de mesurer les activités sexuelles à l'aide d'appareillages qu'il a lui-même conçus. À nouveau contraint de s'exiler, il quitte la Suède pour s'établir en Norvège, où il fonde en 1938 l'Institut de recherches biologiques d'économie sexuelle. C'est à cette même époque que Alexander Sutherland Neill, connu pour ses méthodes pédagogiques novatrices expérimentées à l'école de Summerhill, lui rend visite et s'inspire de ses conceptions dans son approche pédagogique de la sexualité. Il entreprit lui-même pendant six semaines une végétothérapie, nouvelle thérapie mise au point par Reich qui lui procura, selon ses dires, une aide bien plus essentielle que des années de psychanalyse.
Un an plus tard, Reich émigre définitivement aux États-Unis et s'installe en tant que professeur d'analyse caractérielle à la New school for social research. Il habite alors Forest Hill où il installe son laboratoire afin de poursuivre ses recherches. Il rencontre en 1939 Ilse Ollendorff, qu'il épousera en seconde noce. Il poursuit ses recherches sur ce qu'il appelle l'orgone, une énergie élémentaire qui serait de nature cosmique, visible, quantifiable et utilisable. En 1941, il rend visite à Einstein et lui expose ses idées sur la possibilité d'isoler et d'accumuler cette énergie. Il lui laisse un accumulateur d'orgone qu'il vient tout juste de construire. Il fabriqua ensuite un orgonomètre, à partir d'un compteur Geiger, dans le but de mesurer l'intensité[...]
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Écrit par
- Jacquy CHEMOUNI : docteur en histoire, professeur de psychologie clinique et de psychopathologie, psychanalyste
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