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SELF WILL (1961- )

Will Self - crédits : Colin McConnell/ Toronto Star/ Getty Images

Will Self

William Woodard Self est né à Londres en 1961. Écrivain et journaliste prolifique, il a la réputation d'être l'enfant terrible de la scène littéraire londonienne. Lecteur avide et précoce, éduqué dans une famille de la classe moyenne lettrée (son père enseignait à la London School of Economics, sa mère travaillait dans l'édition), il suit des études de philosophie, de politique et d'économie à l'université d'Oxford. Malgré cette formation, Will Self n'hésite pas à brocarder dans ses essais les nantis du monde littéraire et politique, à parler crûment de sexe, de drogue, de perversité, de psychose et de violence dans ses romans, et à se montrer brusque et provocateur dans les médias. Le personnage public flamboyant qu'il s'est construit ne devrait toutefois pas occulter le fait qu'il est l'un des auteurs les plus inventifs et radicaux de sa génération. Depuis 1991, il a publié un nombre considérable d'essais, de romans et de nouvelles. Ses textes de fiction se caractérisent par une veine grotesque, macabre, surréaliste et souvent absurde, et par une langue qui va du lyrisme raffiné au prosaïsme vulgaire, du vocabulaire le plus sophistiqué à l'argot le plus graveleux. Cynique et satiriste dans la veine d'un Jonathan Swift, Self se plaît à faire cohabiter l'ordinaire et l'obscène pour mettre au jour la noirceur de la nature humaine et les hypocrisies de la société moderne.

Des mondes parallèles

Les ouvrages de Will Self, grand admirateur de William Burroughs et de J. G. Ballard, mêlent réalisme et fantastique et créent des mondes parallèles violents et perturbants en milieu urbain ou posturbain. Après avoir travaillé pendant six années comme dessinateur humoristique (ce qui peut expliquer la dimension très visuelle de son œuvre), Self publia en 1991 son premier recueil de nouvelles, La Théorie quantitative de la démence, suivi l'année suivante de Vice-versa, composé de deux textes burlesques où les personnages se rendent compte un matin qu'ils ont changé de sexe, puis Mon idée du plaisir (1993) qui met en scène un personnage doté d'une mémoire eidétique (ou mémoire totale) et mêle violence, meurtre et nécrophilie. Dans Les Grands Singes (1997), les habitants d'une ville se sont métamorphosés du jour au lendemain en chimpanzés tandis que les rares êtres humains qui demeurent sont cantonnés dans des zoos. Ainsi vivent les morts (2000) développe le propos de la nouvelle Le Livre des morts de Londres-Nord (1991) et relate comment les morts de Londres poursuivent leur existence dans des quartiers plus éloignés de la ville.

À l'instar de Peter Ackroyd et Ian Sinclair, Self est un écrivain de Londres. Mais sa vision de la métropole est essentiellement fondée sur la contre-utopie. Cela en fait un lieu de corruption, d'apathie et de putréfaction, comme l'illustrent Ainsi vivent les morts, mais aussi Dorian (2002) et Le Livre de Dave (2006). Dans ce dernier roman, un chauffeur de taxi homophobe et misogyne met à profit sa connaissance approfondie de la ville de Londres pour écrire un livre rageur à la fin du xxe siècle. Le même ouvrage est, cinq cents ans plus tard, adopté comme texte sacré par les habitants de la capitale britannique à présent réduite à quelques îlots isolés. L'importance accordée aux lieux et à la flânerie urbaine est au cœur du recueil d'essais Psychogéographie (2007), terme emprunté à Guy Debord pour analyser la façon dont un lieu influe sur les émotions et le comportement d'un individu.

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Écrit par

  • : habilitée à diriger des recherches en études anglophones, professeure des Universités à l'École normale supérieure de Lyon

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Média

Will Self - crédits : Colin McConnell/ Toronto Star/ Getty Images

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  • ANGLAIS (ART ET CULTURE) - Littérature

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