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BEVERIDGE WILLIAM HENRY (1879-1963)

William Beveridge - crédits : Haywood Magee/ Picture Post/ Getty Images

William Beveridge

Après des études à Oxford, Beveridge est nommé, à vingt-quatre ans, sous-directeur d'un foyer londonien à but philanthropique ; bientôt il dirige les services officiels de chômage et de placement. Ces activités l'amènent à se pencher sur le problème de l'emploi. Nommé directeur de la London School of Economics and Political Science en 1919, puis élu master de University College à Oxford en 1939, il fait figure de spécialiste du chômage. Durant la Seconde Guerre mondiale, le gouvernement britannique lui confie la direction d'un comité interministériel chargé de préparer un rapport sur les systèmes d'assurance sociale. Présenté sous le titre Social Insurance and Allied Services et rendu public le 1er décembre 1942, sous un gouvernement conservateur, le « rapport Beveridge » est vendu à 70 000 exemplaires le jour même de sa parution.

Influencé par la pensée de Keynes et prolongeant certains aspects de celle-ci, Beveridge part d'une idée-force très simple : vu le stade de richesse globale qu'a atteint le pays, l'indigence de certains citoyens est un scandale qui doit être éliminé et qui peut l'être par un effort systématique de la nation. Dans Full Employment in a Free Society (1944, Du travail pour tous dans une société libre), ouvrage qui, deux ans après la parution du rapport, présente les solutions proposées dans celui-ci de façon plus approfondie et les situe dans une perspective keynésienne, il écrit : « À l'avenir, l'État aura la charge d'une nouvelle fonction publique. Il doit assurer un décaissement total suffisant pour protéger ses citoyens contre un chômage massif aussi énergiquement qu'il lui appartient de les défendre [...] contre le vol et la violence. » Ainsi apparaît l'idée d'un droit de chacun à la sécurité sociale, à la garantie d'un revenu minimum et à l'emploi. De manière précise, le rapport décrit les mesures à prendre pour assurer à tous une protection effective contre certaines infortunes, telles la perte de l'emploi, la maladie, l'ignorance. En particulier, pour subvenir aux besoins créés par cette nouvelle politique économique et sociale, il préconise le recours à l'emprunt public, « car l'État n'est pas un particulier. Le particulier s'appauvrit en s'endettant. Mais une dette publique ne fait que transférer les revenus des uns [contribuables] à d'autres [prêteurs de l'État] ; elle ne réduit pas et ne peut pas réduire la richesse de la communauté ». Une telle conception équivaut au rejet des principes budgétaires traditionnels (règle de l'équilibre entre les dépenses engagées par l'État et les recettes obtenues, contrôle et compression des dépenses publiques). Appliquant l'idée développée par Keynes dans la Théorie générale de l'emploi, de l'intérêt et de la monnaie, Beveridge considère que c'est le plein-emploi qui fait la prospérité — et non l'inverse — et qu'en conséquence le gouvernement doit fonder sa politique budgétaire sur « le potentiel humain disponible, et non pas sur l'argent ». Bien que combattues par les milieux les plus conservateurs, les grandes lignes du rapport sont approuvées par Winston Churchill, alors chef du Cabinet. Depuis lors, le rapport Beveridge a inspiré l'action du gouvernement britannique, notamment sa politique de Welfare State fondée sur la mise en œuvre d'une authentique solidarité nationale ; il a également influé sur nombres d'autres gouvernements, en particulier en matière de sécurité sociale.

Membre du Parti libéral, Beveridge est élu député en 1944, puis élevé à la pairie. Outre le rapport auquel le public a donné son nom et le développement qu'il en propose dans Full Employement in a Free Society, sir William Beveridge a laissé[...]

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Écrit par

  • : professeur émérite à l'université de Paris-I

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William Beveridge - crédits : Haywood Magee/ Picture Post/ Getty Images

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