JEVONS WILLIAM STANLEY (1835-1882)
Des travaux théoriques
Dans le domaine de la logique, discipline qui a occupé une grande partie de son temps de 1866 à 1876, Jevons acquiert une réputation aussi importante qu'en économie. Ses différents ouvrages – Logique pure (Pure Logic, 1863), Les Principes de la science (The Principles of Science, 1874), Leçons élémentaires de logique (Elementary Lessons in Logic, 1876) –, qui connurent parfois une importante diffusion, critiquent John Stuart Mill qu'il abhorrait et dont il bat en brèche l'influence sur la pensée britannique. Jevons fait en même temps œuvre de pionnier en logique formelle. Il inventa même une machine, présentée à la Royal Society en 1870, qui déduisait mécaniquement les conclusions des prémisses qu'on y introduisait. Grand lecteur, propriétaire d'une importante bibliothèque et fréquentant les bouquinistes lors de ses excursions à Paris, Jevons a attiré l'attention sur les travaux d'Herman Heinrich Gossen aussi bien que sur ceux de James W. Gilbart et Charles Babbage et a contribué à la redécouverte de Richard Cantillon.
Toutefois, c'est dans le domaine de l'économie pure que se trouve aujourd'hui l'essentiel de l'apport de Jevons. Dans sa Théorie de l'économie politique (Theory of Political Economy, 1871), qui développe des idées présentées en 1862 devant la section statistique et économique de l'association britannique pour l'avancement des sciences (Notice on a General Mathematical Theory of Political Economy), il formule la proposition que, du point de vue méthodologique, l'économie ne peut être qu'une science mathématique, utilisant plus particulièrement le calcul différentiel, reconnaissant en cela l'intérêt des travaux de Jules Dupuit et d'Antoine Augustin Cournot et recourant à l'algèbre ou aux diagrammes. Il en est ainsi selon Jevons « parce que l'économie traite des quantités », ajoutant que le plaisir, la peine, l'utilité, la valeur, la richesse, la monnaie, le capital sont des notions susceptibles d'être quantifiées. Formulant la théorie du degré final d'utilité – « le degré d'utilité est une fonction mathématique continue de la quantité d'un bien », écrit-il à son frère le 1er juin 1860 –, Jevons inaugure aussi, avec les découvertes de Carl Menger en Autriche (1871) et de Léon Walras (1874) en Suisse – avec lequel il échange une importante correspondance –, l'ère du marginalisme dans la pensée économique. Pour lui, en effet, suivant sa propre formule : « Le coût de production détermine l'offre ; l'offre détermine le degré final d'utilité ; le degré final d'utilité détermine la valeur. » Il applique ce principe à l'échange (indiquant que le taux d'échange de deux biens est inversement proportionnel au rapport de l'utilité marginale des deux biens échangés), à l'offre de travail (qui se détermine au point où s'égalisent l'utilité marginale et la désutilité marginale du travail) et, d'une manière beaucoup plus sommaire, à la théorie du capital. L'influence de Jevons sur la pensée britannique, en particulier par l'intermédiaire d'Alfred Marshall, a été considérable.
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Écrit par
- Guy CAIRE : professeur de sciences économiques à l'université de Paris-X-Nanterre
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