LAMB WILLIS EUGENE (1913-2008)
Le physicien américain Willis Eugene Lamb Jr, prix Nobel en 1955, est décédé le 15 mai 2008 à Tucson (Arizona). Fils d'un technicien en téléphonie, il naît le 12 juillet 1913 à Los Angeles en Californie. Il effectue toutes ses études supérieures à l'université de Berkeley et y soutient sa thèse en 1938, sous la direction de Robert J. Oppenheimer (1904-1967). Il y étudie les propriétés électromagnétiques des noyaux atomiques. Il rejoint alors l'université Columbia de New York où il gravit tous les échelons d'une carrière académique. En 1951, il est nommé professeur à l'université de Stanford en Californie, puis s'établit en 1956 à Oxford (Royaume-Uni) avant d'obtenir en 1962 la chaire Henry Ford de l'université Yale à New Haven dans le Connecticut. De 1974 à 2002, il termine sa carrière à l'université de l'Arizona.
Les premiers travaux de Lamb traitent de la capture des neutrons lents par des matériaux hydrogénés ou par des cristaux. Dès 1939, à l'âge de vingt-six ans, il se distingue par un article théorique dans lequel il prédit des transitions entre niveaux d'énergie des noyaux atomiques qui mériteront à Rudolf Mössbauer le prix Nobel de physique, lorsqu'elles seront observées expérimentalement et correctement interprétées vingt ans plus tard. Ce phénomène de fluorescence résonnante sans recul des noyaux est connu sous le nom d'effet Mössbauer. Lamb aborde aussi la condensation de Bose-Einstein, la propagation de l'ordre dans un réseau cristallin ou l'extraction d'électrons par bombardement ionique d'une surface métallique.
Cependant, l'effort scientifique au service de l'armée se développe aux États-Unis en ces temps de guerre. Les recherches sur le radar (et les techniques de construction de tubes à vide) réunissent au laboratoire des rayonnements de Columbia quelques très grands physiciens, dont Isidore Isaac Rabi, Polykarp Kusch et Willis Lamb. Leur but est en particulier de fabriquer des sources de micro-ondes de courtes longueurs d'onde. Après la guerre, Kusch et Lamb appliqueront les méthodes inventées par Rabi à l'étude des spectres atomiques au moyen d'ondes radio. En 1946, Lamb publie une théorie de la spectroscopie micro-onde. En 1947, il conçoit et réalise avec son étudiant Robert. C. Retherford un appareillage qui leur permit de mesurer très précisément une minuscule différence d'énergie entre deux états excités (notés 2S1/2 et 2P1/2) de l'atome d'hydrogène. L'article publié en août 1947 dans la Physical Review de la société américaine de physique est titré : « La Structure fine de l'atome d'hydrogène par une méthode micro-onde ». Six articles publiés entre 1950 et 1953 détailleront les mesures supplémentaires effectuées par Lamb et ses collaborateurs sur des atomes d'hydrogène et de deutérium. Lamb reçoit pour ces mesures le prix Nobel de physique en 1955, prix Nobel partagé avec Kusch, qui avait indépendamment obtenu des résultats d'une portée comparable.
Après avoir dissocié des molécules d'hydrogène dans un four, Lamb bombarde le faisceau d'atomes émergeant par des électrons afin d'en amener une très faible fraction à un état métastable ; ces atomes excités sont ensuite conduits vers une surface métallique où ils sont détectés par éjection de leur électron. Les atomes sont sans cesse soumis à des ondes radio, tout l'appareil étant plongé dans un champ magnétique. Une analyse théorique et expérimentale extrêmement précise permet alors à Lamb d'en déduire la minuscule différence d'énergie entre les deux états de l'atome. Cet « effet Lamb » – comme on l'appelle depuis lors – démontre les insuffisances de la théorie de Dirac de l'électron si on ne « quantifie » pas le champ électrique. Selon la représentation quantique, il faut prendre en compte[...]
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Écrit par
- Bernard PIRE : directeur de recherche émérite au CNRS, centre de physique théorique de l'École polytechnique, Palaiseau
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HYDROGÈNE (physique)
- Écrit par Bernard PIRE
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En 1947, Willis Lamb (1913-2008) réussit à mesurer très précisément une minuscule différence d'énergie entre deux états excités de l’atome d’hydrogène qui ne devait pas exister selon les théories existantes. Ce « décalage de Lamb » – comme on l'appelle depuis lors – montre des insuffisances dans la théorie...