BURKHARD WILLY (1900-1955)
Malgré une vie écourtée, Willy Burkhard apparaît à deux titres comme un des musiciens suisses les plus importants du xxe siècle : en premier lieu, par ses compositions, largement inspirées par un profond sentiment religieux et dans lesquelles il se présente comme un rénovateur de la musique liturgique protestante ; en second lieu par son activité de pédagogue, dont l'influence perdure à travers les nombreux élèves qu'il a formés.
Compositeur foncièrement alémanique par son tempérament austère, par sa prédilection pour les techniques contrapuntiques complexes et âpres, Willy Burkhard a édifié une œuvre qui porte la marque de son inclination pour Jean-Sébastien Bach et Anton Bruckner, mais qui manifestera également les influences d'Alexandre Scriabine, de Béla Bartók, de Paul Hindemith et d'Igor Stravinski. Toutes influences qu'il assimilera dans un style propre caractérisé par un esprit rhapsodique.
Willy Burkhard, né à Évilard-sur-Bienne (canton de Berne, Suisse) le 17 avril 1900, entame ses études musicales au Conservatoire de Berne, avec notamment l'organiste suisse Ernst Graf ; il les poursuit à Leipzig avec Sigfrid Karg-Elert et Robert Teichmüller, à Munich avec Walter Courvoisier et à Paris avec Max d'Ollone. De retour à Berne, il commence à enseigner, d'abord en donnant des cours privés, ensuite en devenant professeur de théorie au conservatoire de cette ville (1928-1933). En 1926, il débute dans la direction d'orchestre et de chœur et obtient ses premiers succès de compositeur. Ayant contracté la tuberculose, il abandonne en 1933 l'enseignement, qu'il ne reprendra qu'en 1942, comme professeur de théorie et de composition au conservatoire de Zurich, poste qu'il occupera jusqu'à sa mort. Parmi ses élèves figurent les compositeurs Meinrad Schütter, Artur Gelbrun, Armin Schibler, Paul-André Gaillard, Klaus Huber (qui composera en 1955 In memoriam Willy Burkhard, pour orgue), Jón Nordal, Ernst Widmer, Giuseppe G. Englert, Rudolf Kelterborn, le flûtiste Aurèle Nicolet. Willy Burkhard meurt à Zurich le 18 juin 1955.
Son catalogue comprend une centaine d'opus. La rudesse, les violents contrastes et la hardiesse des dissonances qui caractérisent ses premières œuvres céderont peu à peu la place à une harmonie tonale où s'affirme une parfaite maîtrise du style fugué, de l'imitation et de la variation. Sa foi religieuse s'exprime dans des pièces pour orgue, des chœurs, des cantates, des oratorios, parmi lesquels le premier, Das Gesicht Jesajas (« La Vision d'Isaïe », opus 41, 1935), lui apporte la notoriété internationale. Burkhard manifestera toujours une prédilection pour la voix ; il a composé de nombreux lieder et son unique opéra, Die Schwarze Spinne (« L'Araignée noire », opus 80, 1948, révisé en 1954), un ouvrage en deux actes sur un livret de Robert Faesi et de Georgette Boner d'après une histoire très populaire en Suisse du pasteur Jeremias Gotthelf, connaît le succès lors de sa création à l'Opéra de Zurich, le 28 mai 1949, avec Lisa Della Casa dans le rôle de la Jeune Femme. Par sa forme originale, combinant des éléments opératiques et un récitant, Die Schwarze Spinne se rapproche des oratorios dramatiques de ses compatriotes Arthur Honegger et Frank Martin. Burkhard a également composé des œuvres pour orchestre, dont se détache un magnifique Concerto pour alto (opus 93, 1953), des pièces pour piano (dont Six Préludes, opus 99, 1953-1955, faisant appel à la technique dodécaphonique), de la musique de chambre, avec en particulier la Petite Sérénade pour violon et alto (opus 15, 1926), la Sonate pour alto (opus 59, 1939), la Sérénade, pour huit instruments (flûte, clarinette, basson, cor, harpe, violon, alto et contrebasse, opus 77, 1945).
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Écrit par
- Alain FÉRON : compositeur, critique, musicologue, producteur de radio
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