Abonnez-vous à Universalis pour 1 euro

MOZART WOLFGANG AMADEUS (1756-1791)

La maturité (1779-1788)

Pendant trois ans, il pose les bases de son évolution future : concertos pour le piano, sonates pour violon et piano, sérénades qui font craquer les limites galantes du genre. Tout cela aboutit à un chef-d'œuvre dramatique qui, en dépit de la forme désuète de l' opera seria, offre les prémices de tout son art lyrique et symphonique : l' Idoménée (Munich, 29 janvier 1781). En mai, il rompt, après des scènes affligeantes, avec son employeur, l'archevêque Colloredo, et s'installe, sans ressources et sans situation, à Vienne. Son père désapprouve cette rébellion et prend plus mal encore les fiançailles de Wolfgang avec Constanze Weber, qu'il estime indigne de lui. Mozart passera outre et l'épousera le 3 août 1782.

L'Enlèvement au sérail, Mozart - crédits : AKG-images

L'Enlèvement au sérail, Mozart

Un problème se pose alors au Maître : comment gagner la plus vaste audience possible – car la vie même du jeune ménage en dépend –, non seulement en s'interdisant toute concession à la facilité, mais encore en mettant tout en œuvre pour hausser le public superficiel de Vienne à des hauteurs inaccoutumées ? Mozart a enfin l'occasion d'écrire, pour la scène, un opéra qui ressortit à un genre où il est libre, le Singspiel, et où il ne subit plus les lourdes contraintes de l'opera seria. L'Enlèvement au sérail, opérette allemande, inaugure, le 16 juillet 1782, la série de ses chefs-d'œuvre lyriques.

À partir de 1782, Mozart passe par des crises successives qui deviendront de plus en plus graves à mesure qu'il approche de la mort. Ces périodes où l'ethos se fait angoissé et, par moments, tragique (1783, 1785, 1787, 1790), alternent avec de merveilleuses accalmies (1784, 1786, 1788, 1791).

Aucun événement de sa vie privée ne saurait expliquer ces « strangulations ». Elles se comprennent, mais en partie seulement, par des problèmes de technique musicale : la rencontre de nouvelles formes d'écriture crée toujours chez lui une contraction de style qui ne peut se détendre que lorsque les nouveautés ont été complètement assimilées ; et, par assimilation, on n'entend pas l'art d'adopter des procédés (ce qui pour lui était un jeu d'enfant), mais le fait d'en arriver à parler ces langages à l'état naissant. Certes, après son retour de Paris, tous les styles proprement contemporains lui étaient devenus familiers, et ce n'est pas une des choses les moins stupéfiantes qu'un musicien doué d'une telle mémoire ait pu rester foncièrement libre à l'égard de toute imitation. Pourtant, il lui restait encore deux langages à découvrir et à faire siens : l'un qui avait son assise dans le passé, l'autre qui s'ouvrait audacieusement sur l'avenir. Le premier est la puissante structure baroque de type fugal, représenté par Jean-Sébastien Bach ; le second, illustré par Joseph Haydn, surtout dans ses quatuors à cordes, est le style thématique du type sonate, avec ce qu'il implique de richesse harmonique, par l'extension tonale, et de construction dialectique orientée vers la forme cyclique. C'est en 1782 que Mozart découvre ces deux langages antinomiques, qui sont d'ailleurs l'un et l'autre peu compatibles avec la mélodicité à laquelle son travail de synthèse l'a fait parvenir. C'est donc à un nouveau travail de synthèse qu'il va s'adonner durant ses deux premières années viennoises (1782-1783), synthèse d'autant plus vaste et difficile qu'elle doit englober tout ce qu'il a précédemment acquis. Ces découvertes, il les a faites à point nommé : tôt, puisqu'il n'a que vingt-six ans ; tard, puisqu'il n'a plus que neuf ans à vivre...

Mozart- Bach ! Conjonction historique impressionnante, d'autant plus qu'il fallait alors du courage, et presque de l'audace, pour remonter le cours du temps.[...]

La suite de cet article est accessible aux abonnés

  • Des contenus variés, complets et fiables
  • Accessible sur tous les écrans
  • Pas de publicité

Découvrez nos offres

Déjà abonné ? Se connecter

Écrit par

Classification

Médias

Léopold Mozart et ses enfants, Wolfgang Amadeus et Maria Anna, Carmontelle - crédits : Erich Lessing/ AKG-images

Léopold Mozart et ses enfants, Wolfgang Amadeus et Maria Anna, Carmontelle

L'Enlèvement au sérail, Mozart - crédits : AKG-images

L'Enlèvement au sérail, Mozart

Les Noces de Figaro - crédits : John Chillingworth/ Moviepix/ Getty Images

Les Noces de Figaro

Autres références

  • CORRESPONDANCE (W. A. Mozart)

    • Écrit par
    • 987 mots

    Des grands compositeurs du xviiie siècle, Wolfgang Amadeus Mozart et Carl Philipp Emanuel Bach sont ceux dont nous sont parvenus le plus grand nombre d'écrits. Pour Mozart, il s'agit essentiellement de lettres, alors qu'à la correspondance du Bach de Berlin et de Hambourg s'ajoutent de nombreux articles...

  • MORT DE MOZART

    • Écrit par
    • 227 mots

    Le 5 décembre 1791, cinq minutes avant une heure du matin, Wolfgang Amadeus Mozart meurt à Vienne. Enfant prodige, compositeur doté de facilités uniques, Mozart occupe une place essentielle dans l'histoire de la musique car il est le premier musicien à s'être libéré de la tutelle des princes et des...

  • ABEL KARL FRIEDRICH (1723-1787)

    • Écrit par
    • 203 mots

    Symphoniste allemand de l'école préclassique, né le 22 décembre 1723 à Köthen, dans le duché d'Anhalt-Köthen, mort le 20 juin 1787 à Londres, Karl (ou Carl) Friedrich Abel fut l'un des derniers virtuoses de la viole de gambe.

    Après avoir joué dans l'orchestre de la...

  • BACH JEAN-CHRÉTIEN (1735-1782)

    • Écrit par
    • 785 mots

    Cadet des quatre fils musiciens de Jean-Sébastien Bach, Jean-Chrétien, né à Leipzig, n'a que quinze ans lorsque son père meurt ; il n'a pu bénéficier au même titre que ses demi-frères Wilhelm Friedemann et Carl Philipp Emanuel, d'une génération plus âgés que lui, de l'influence et des conseils...

  • BADURA-SKODA PAUL (1927-2019)

    • Écrit par
    • 673 mots

    Issu d’une famille d’ascendance hongroise et morave, Paul Badura-Skoda naît à Vienne le 6 octobre 1927. Il étudie le piano et la direction d’orchestre au conservatoire de la capitale autrichienne sous la férule de Martha Wiesenthal, Viola Thern et Otto Schulhof. Il y obtient en 1948 les...

  • BARENBOIM DANIEL (1942- )

    • Écrit par
    • 1 784 mots
    • 1 média
    ...carrière est lancée. Y compris comme chef, puisqu'il enregistre pour R.C.A. les concertos de Beethoven avec Arthur Rubinstein au clavier ! Mais c'est Mozart qui lui vaut la consécration : son intégrale des sonates mais surtout des concertos avec l'English Chamber Orchestra, d'une verve inouïe et d'une...
  • Afficher les 70 références