RIHM WOLFGANG (1952-2024)
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Le compositeur allemand Wolfgang Rihm a été une figure majeure de la musique contemporaine grâce à la qualité et à la richesse de son catalogue, mais aussi par ses prises de position très critiques à l'égard de l'évolution de la musique au cours de la seconde moitié du xxe siècle. Au côté notamment de Manfred Trojahn, il a en effet implicitement remis en cause l'avant-garde sérielle, la considérant comme un nouvel académisme, dans le célèbre manifeste de 1981, Zur « neuenEinfachheit » in der Musik (« Vers une “nouvelle simplicité” en musique ») ; il engageait ainsi une controverse esthétique qui le fit immédiatement soupçonner par certains de ses pairs de cautionner des attitudes réactionnaires en prônant des valeurs néo-romantiques jugées révolues, comme la consonance et la tonalité.
Pour ce compositeur inclassable, ces affinités néo-romantiques ont été rapidement dépassées : il n'était de toute façon pas question d'immobilisme ou de retour en arrière, mais, pour Rihm, on ne peut pas non plus faire table rase du passé et créer ex nihilo. La musique doit être expressive et avant tout s'adresser à l'auditeur.
Né le 13 mars 1952 à Karlsruhe (Bade-Wurtemberg, Allemagne), Wolfgang Rihm étudie de 1968 à 1972 la composition avec Eugen Werner Velte à la Hochschule für Musik de sa ville natale. Il assiste pour la première fois en 1970 aux cours d'été de Darmstadt, où Karlheinz Stockhausen lui fait grande impression. En 1972, il part pour Cologne afin de suivre durant un an l'enseignement de Stockhausen. De 1973 à 1976, il se perfectionne en composition auprès de Klaus Huber, et il suit des cours de musicologie avec Hans Heinrich Eggebrecht. Il reçoit également les conseils de Wolfgang Fortner et de Humphrey Searle. Parallèlement, il enseigne de 1973 à 1978 à la Hochschule für Musik de Karlsruhe, où il sera nommé professeur de composition en 1985, succédant à son maître Velte.
Webern, Stockhausen et Morton Feldman marquent les premières œuvres de Rihm. Celles de la maturité seront influencées par Wilhelm Killmayer, Helmut Lachenmann et, surtout, Luigi Nono. Mais, au début des années 1970, Rihm découvre Edgar Varèse ; c'est la révélation. Pour Varèse, le son est le matériau brut, la musique n'est rien d'autre que du « son organisé ». L'investissement de Varèse dans la recherche de nouveaux moyens techniques capables de produire des sons inouïs, la force primitive, quasi incantatoire, qui se dégage de sa musique trouvent un écho dans la sensibilité du jeune Rihm. Alors qu'enfant il sillonnait Karlsruhe en reconstruction, les bruits de la ville en chantier avaient suscité en lui une très vive attirance. Ces souvenirs sonores le marqueront fortement.
Dans sa pièce pour orchestreSub-Kontur (1976), Rihm affirme sa volonté de se référer à une tradition romantique allemande en réintroduisant la notion de pathos.
Rihm aime la grande forme, l'orchestre, l'opéra. Il ne recule ni devant des œuvres de grande dimension ni devant des effectifs considérables et se montre particulièrement habile à composer pour la voix. Presque toutes ses œuvres importantes reposent d'ailleurs sur des arguments littéraires ou poétiques. Il compose en 1976 son premier opéra de chambre, Faust und Yorick, d'après un texte de Jean Tardieu. Un deuxième opéra de chambre, Jakob Lenz, d'après Büchner, est créé le 8 mars 1979 à l'Opéra de Hambourg. Il collabore avec Heiner Müller pour l'opéra Die Hamletmaschine (1987). Œdipus (1987) est une pièce de théâtre musical sur des textes de Sophocle, de Nietzsche et de Heiner Müller. L'opéra Die Eroberung von Mexico (1992), d'après Octavio Paz, Artaud et trois poèmes anonymes indiens, est une sorte de requiem sur la destruction de la culture ; cette œuvre au lyrisme exalté présente une écriture[...]
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Écrit par
- Juliette GARRIGUES : musicologue, analyste, cheffe de chœur diplômée du Conservatoire national supérieur de musique de Paris, chargée de cours à Columbia University, New York (États-Unis)
- Encyclopædia Universalis : services rédactionnels de l'Encyclopædia Universalis
Classification
Média
Autres références
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NOUVELLE SIMPLICITÉ, musique
- Écrit par Alain FÉRON
- 515 mots
En 1981 paraît chez Universal Edition, à Vienne, dans la revue StudienzurWertungsforschung dirigée par Otto Kolleritsch, une série d'articles rassemblés sous le titre Zur « neuenEinfachheit » in der Musik, que l'on peut traduire par « Vers une nouvelle simplicité en musique ». Ce...