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DOLAN XAVIER (1989- )

Un homme-orchestre

La déjà longue carrière d'acteur de Xavier Dolan s'est sans doute révélée un atout décisif pour diriger les comédiens. Leur fidélité – Anne Dorval et Suzanne Clément en tête – montre l'attachement réciproque qu'ils se portent. Quoi de commun en effet, dans les personnages incarnés par Suzanne Clément, entre Julie Cloutier, l'enseignante confidente de l'adolescent en colère de J'ai tué ma mère, Fred, la compagne aimante de Laurence Anyways (2012), qui suit aussi loin qu'elle peut son mari (Melvil Poupaud), dans son destin de « devenir-femme », et Kyla, la voisine bègue, à l'apparence introvertie, de Mommy ? Rien de commun si ce n'est l'excellence de l'interprétation.

Niels Schneider, ange aux boucles blondes, pensionnaire à l'internat au côté de l'adolescent interprété par Dolan dans J'ai tué ma mère, devient, dans Les Amours interdits (2010), le clair objet du désir conjoint de deux amis intimes, Marie (Monia Chokri) et Francis (Dolan). Jeune adolescent dans Laurence Anyways, Antoine Olivier Pilon interprète le rôle du garçon maltraité et mis en croix dans College Boy (2013), le clip sulfureux d'Indochine réalisé par Dolan, avant d'incarner l'adolescent violent de Mommy.

Le sentiment que ses films émanent d'une petite troupe complice est accentué par la place que Dolan lui-même y occupe. Homme-orchestre, tout à la fois auteur, réalisateur, producteur, monteur et créateur des costumes, il tient souvent le rôle principal.

À cet égard, Tom à la ferme (2013) constitue un petit pas de côté et, qui plus est, loin de Montréal. Dolan adapte ici une pièce de Michel Marc Bouchard et met en scène Lise Roy et Évelyne Brochu dans les rôles qu'elles ont interprétés à la scène. Cheveux teints en blond, Dolan y incarne un jeune publicitaire montréalais qui se rend, au fin fond de la campagne québécoise, à l'enterrement de l'homme qui partageait sa vie pour y découvrir que la mère de ce dernier ignorait tout de l'homosexualité de son fils. On a parlé de thriller psychologique et cité Hitchcock à propos de ce film trouble et vénéneux. On peut imaginer combien le personnage de cette fermière aimante et autoritaire a pu captiver Dolan, tout comme ce qui se trame entre ce publicitaire et le frère de son amant. Ce dernier sait que son frère était homosexuel, et noue, avec le publicitaire québécois, entre répulsion et fascination, une relation sadomasochiste, autre motif que l'on peut retrouver en filigrane dans l'œuvre de Dolan.

Avec six longs-métrages, primés pour la plupart dans de grands festivals (Juste la fin du monde a reçu le Grand prix du festival de Cannes 2016), Xavier Dolan donne une couleur inédite au cinéma d'auteur québécois, plus connu pour sa discrétion et son quant-à-soi. Le cinéaste appartient désormais au club de ces auteurs d'audience internationale dont les cinéphiles attendent chaque nouveau film.

— Jacques KERMABON

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Média

Xavier Dolan au festival de Cannes 2014 - crédits : Stephane Cardinale/ Corbis Entertainment/ Getty Images

Xavier Dolan au festival de Cannes 2014

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