XIA GUI[HIA KOUEI](actif vers 1190-1225)
On ne possède que très peu d'informations sur la vie de Xia Gui : il était originaire des environs de Hangzhou et occupa une position officielle à l'Académie impériale de peinture sous le règne de l'empereur Ningzong (1195-1224).
La peinture de Xia Gui, très appréciée à l'époque, lui valut la distinction honorifique du « ruban d'or ». Avec son contemporain Ma Yuan, il fut le plus important représentant de la peinture de paysage à l'époque des Song du Sud.
Hangzhou et l'Académie des Song du Sud
Son activité s'exerça dans un milieu de rêve, à une époque paradoxale. Milieu de rêve : Hangzhou avec ses collines et son lac, ville fastueuse qui unissait tous les raffinements de la vie urbaine aux charmes d'un site exquis. Époque paradoxale, où l'humiliation nationale se doublait d'une prospérité sans précédent, où l'impuissance politique s'accompagnait d'un superbe épanouissement culturel. Sous la pression du royaume tartare des Jin, la dynastie Song, incapable de lutter – ou plutôt incapable d'entretenir une volonté de lutte, (car les moyens matériels et militaires étaient loin de lui faire défaut) –, avait acheté une paix provisoire en renonçant à la moitié septentrionale de l'Empire et déplacé sa capitale à Hangzhou. Là, tournant le dos à l'orage qui s'accumulait, elle s'offrit, pour un siècle et demi encore, le luxe d'un crépuscule nonchalant et splendide. Si les hommes d'action rongeaient leur frein dans ce climat débilitant, poètes et artistes, eux, y trouvaient leur compte : en échangeant les paysages grandioses et sévères de la Chine du Nord pour la douceur luxuriante de cette nature amène, ils avaient trouvé une inspiration nouvelle, d'un caractère plus lyrique et intime. En même temps, le milieu urbain de Hangzhou offrait à leur activité des conditions intellectuelles et matérielles particulièrement favorables. Malgré toutes les vicissitudes politiques des périodes ultérieures, cette prépondérance culturelle et artistique de la région du Sud-du-Fleuve, consacrée par l'établissement temporaire de la capitale politique à Hangzhou, restera un fait définitivement acquis pour les siècles à venir.
Sitôt installés dans leur nouvelle capitale, les Song du Sud s'étaient empressés de reconstituer cette académie de peinture à laquelle le dernier souverain des Song du Nord, Huizong (1101-1126), à la veille même de perdre et son trône et sa liberté, n'avait cessé de donner le meilleur de son attention. Cette nouvelle académie continua les travaux de l'ancienne, ses premiers chefs de file (Li Tang, Li Di) étaient d'ailleurs d'anciens membres de l'académie de Huizong, venus se réfugier dans le Sud. S'il y a évolution, il n'y a donc pas rupture entre la peinture des Song du Nord et celle des Song du Sud ; Xia Gui et Ma Yuan, qui devaient fournir le type le plus exemplaire du paysage académique, avaient pris pour point de départ l'art de Li Tang, dont la carrière s'était étendue sur les deux périodes et dont la peinture se trouvait directement tributaire de la haute tradition des grands paysagistes des xe et xie siècles, Fan Kuan en particulier. Mais malgré cette filière continue, de Fan Kuan à Xia Gui en passant par Li Tang, la métamorphose est radicale : la sévérité sereine, la plénitude majestueuse de Fan Kuan avaient déjà perdu de leur ampleur chez Li Tang, pour se doubler d'une sensibilité plus impressionniste et subjective.
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Écrit par
- Pierre RYCKMANS
:
reader , Department of Chinese, Australian National University
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