AGNEL YANNICK (1992- )
Humilité et ambition semblent être des traits de caractère antagonistes. C'est pourtant en s'appuyant sur ces deux qualités que le Français Yannick Agnel, un champion atypique et attachant, a triomphé aux jeux Olympiques de Londres en 2012, où il s'est adjugé deux médailles d'or et une médaille d'argent. Nombre de techniciens considèrent alors que ce garçon de vingt ans est déjà le meilleur nageur du monde.
Yannick Agnel est né le 9 juin 1992 à Nîmes (Gard), d'un père infirmier et d'une mère cadre supérieur. Il s'essaye au tennis et au football, avant d'opter pour la natation. Très doué, il décide à quatorze ans de quitter Nîmes pour rejoindre à Nice le groupe de nageurs entraînés par Fabrice Pellerin, malgré les réticences de ses parents, qui craignent que ce choix pénalise ses études – des doutes infondés, puisque Yannick obtiendra un baccalauréat scientifique avec mention bien. Pour l'adolescent, il s'agit d'un déchirement, mais cette orientation lui permet de mûrir rapidement – il vit seul dès l'âge de quinze ans. En outre, Fabrice Pellerin, qui sait qu'il tient une pépite, n'impose pas un entraînement trop rigoureux à ce garçon qu'il souhaite préserver et pour qui la natation n'est pas tout dans la vie : amoureux de lecture, il dévore les livres, allant jusqu'à apprendre le russe pour pouvoir lire un jour Gogol dans le texte.
Le public le découvre aux Championnats de France en 2009, où il détonne totalement : alors que l'heure est aux combinaisons en polyuréthane, aux champions musculeux, voire aux bravades, ce nageur long (2,02 m) et sec choisit de continuer de nager en slip de bain, quitte à se priver d'un avantage chronométrique factice. « Ce n'était pas pour me différencier des autres. [...] Je sais très bien où je vais et ce qu'il faut faire pour y parvenir », déclarera-t-il. En 2010, aux Championnats d'Europe de Budapest, il gagne le 400 mètres, devant l'Allemand Paul Biedermann, recordman du monde. En 2011, aux Championnats du monde de Shanghai, Yannick Agnel obtient la médaille d'argent dans le relais 4 fois 200 mètres ; il se classe par ailleurs cinquième du 200 mètres et sixième du 400 mètres.
Dans l'optique des jeux Olympiques de Londres, Fabrice Pellerin lui impose, comme à tous les nageurs et nageuses de son groupe – dont Camille Muffat –, des séances d'entraînement quotidiennes très dures : de 15 à 16 kilomètres de natation tous les jours, dimanches compris. Il le contraint à plus de rigueur – hygiène de vie, ponctualité, organisation. « Ici, c'est tais-toi et nage ! », déclarera, amusé, le nageur. Au début de l'année 2012, Yannick Agnel cause la surprise : il annonce qu'il ne disputera pas le 400 mètres, qui semble sa meilleure distance, aux Jeux de Londres, mais qu'il souhaite se concentrer sur le 200 mètres et tenter sa chance sur le 100 mètres – un choix osé, car le sprint pur demande des qualités physiques et techniques qu'il ne travaille que depuis quelques mois. Lors des Championnats de France de Dunkerque, en mars 2012, où chacun doit gagner sa place pour les Jeux selon des critères de sélection drastiques, il obtient facilement son billet pour le 200 mètres, mais il remporte aussi le 100 mètres, privant notamment du 100 mètres olympique Alain Bernard, le tenant du titre.
Aux jeux Olympiques de Londres, Yannick Agnel réussit son premier exploit le 29 juillet. Lors du relais 4 fois 100 mètres, lancé par Amaury Leveaux, Fabien Gilot et Clément Lefert, il remonte et dépasse le célèbre Américain Ryan Lochte, auquel il reprend 1 seconde : il offre à l'équipe de France la médaille d'or (3 min 9,93 s), devant les États-Unis (3 min 10,38 s). Le lendemain, il écrase le 200 mètres : il se montre capable de partir vite et d'accélérer[...]
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Écrit par
- Pierre LAGRUE : historien du sport, membre de l'Association des écrivains sportifs
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