YEOMAN
Nom ordinairement donné en Angleterre au paysan propriétaire, lorsque se développe la pratique de l'affermage des grands domaines. Surtout aux xviie et xviiie siècles, le terme de yeoman sert à désigner habituellement aussi les gros fermiers, propriétaires ou non d'ailleurs, d'un bien patrimonial ; en outre, dans les comtés, et jusqu'à la réforme de 1832, le yeoman est le citoyen à part entière, mobilisable dans l'armée et surtout, si son bien propre lui rapporte au moins quarante shillings par an, électeur lors des élections à la chambre des Communes. La prospérité de la classe des yeomen a été variable : bénéficiaires comme tous les propriétaires de la hausse des prix du xvie siècle, les yeomen ont occupé un rang social assez élevé dans les campagnes, ont pu envoyer leurs fils dans les écoles et universités, ont parfois été proches de la gentry à laquelle leurs fils ont accédé à l'occasion ; ils ont partagé avec les riches possédants l'espoir d'accroître leur fortune par le lotissement des prés communaux et par l'extension des enclosures. À la fin du xviie siècle, ils auraient réprésenté, avec leurs familles, plus de 900 000 habitants, c'est-à-dire environ un Anglais sur cinq, mais 280 000 seulement auraient été « de la meilleure condition ». Leur déclin s'amorce avec la période de stagnation et de baisse des prix qui s'étend entre 1680 et 1750, ainsi qu'avec la substitution des très grosses fermes aux locations plus modestes. Les survivants sont sauvés par le puissant mouvement de relèvement des prix agricoles entre 1750 et 1815 et par les enclosures qui, dans la mesure où ils ont pu faire face au coût des opérations, leur ont valu un substantiel accroissement de capital : la seconde moitié du xviiie siècle constitue leur dernier âge d'or, ils occupent alors des demeures souvent cossues et bien meublées. Beaucoup souffrent de la crise agricole postnapoléonienne et, après le sursis des années 1830-1870, de la « grande dépression » agricole de la fin du xixe siècle. L'acte de décès de la yeomanry date de ce moment, même si on veut voir dans les fermiers et les nouveaux exploitants directs de l'époque contemporaine les héritiers de ce groupe social. Le développement industriel les a dépossédés de la place majeure qu'ils avaient un temps occupée dans la nation. De même, le caractère exclusif de leur rôle militaire a disparu très tôt. Le souvenir de la fin de l'époque médiévale et de l'aube des Temps modernes, où les yeomen constituaient le fer de lance des troupes anglaises, explique l'emploi « militaire » du terme de yeoman : les yeomen de la garde royale, créés par Henri VII en 1485, survivent dans le corps des Beefeaters de la Tour de Londres ; enfin, des régiments de volontaires, puis de soldats professionnels ont porté le même nom à la fin du xviiie siècle.
La suite de cet article est accessible aux abonnés
- Des contenus variés, complets et fiables
- Accessible sur tous les écrans
- Pas de publicité
Déjà abonné ? Se connecter
Écrit par
- Roland MARX : professeur à l'université de Paris-III-Sorbonne nouvelle
Classification
Autres références
-
CÔTES DE FER
- Écrit par Roland MARX
- 333 mots
Surnom donné, semblerait-il, par le prince Rupert aux cavaliers de Cromwell qui venaient de le défaire à la bataille de Marston Moor en 1644. Les Côtes de fer trouvent leur origine dans le recrutement, en 1643, par Cromwell d'une force de cavalerie de l'Association orientale des comtés...
-
ROYAUME-UNI - Histoire
- Écrit par Encyclopædia Universalis , Bertrand LEMONNIER et Roland MARX
- 43 835 mots
- 66 médias
...changement préalable de la société, le fait demeure qu'une bourgeoisie de marchands, de fabricants, d'armateurs, d'hommes de loi, à laquelle correspondent, dans les campagnes, la gentry etle groupe des petits propriétaires, les yeomen, a su saisir les occasions et participer aux mutations.