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YESHĪVŌT ou YESHĪBŌT

Pluriel du mot hébreu « yeshīvah », qui désigne une école talmudique supérieure. Ce terme, fréquent dans la littérature talmudique, se rapportait alors, en Palestine comme en Babylonie, aussi bien aux académies des maîtres qu'aux établissements d'enseignement supérieur. Les yeshīvōt fondées par la suite ne gardèrent que cette dernière acception.

La tradition midrashique, projetant le présent dans le passé, fait remonter cette institution à la plus haute antiquité, aux patriarches et même au Déluge (yeshīvah de Sem). Elle s'est, en tout cas, effectivement perpétuée sans interruption depuis l'époque talmudique. Les yeshīvōt se développèrent après la destruction du Temple (70), à l'époque où l'étude devait désormais assurer à elle seule la survie du peuple juif et la Torah lui tenir lieu de patrie. Rabbi Yohanan ben Zakkay obtint de Vespasien l'autorisation d'ouvrir une telle école à Yabné (« Donne-moi Yabné et ses Sages ! »). D'autres furent fondées ensuite à Lod, à Sepporis, à Tibériade, à Oucha, à Bné-Braq... Chaque maître créait son académie.

Après le déclin du judaïsme palestinien, les amora‘im ouvrirent des yeshīvōt en Babylonie (à Nehardéa, à Poumbedita, à Soura). Ces deux derniers centres subsistèrent, après une interruption relativement brève, jusqu'au xe siècle. Des étudiants de tous les pays, même de la chrétienté, y affluaient, attirés par la célébrité de leurs chefs, les ge‘onim (singulier, gaon). Désormais, les yeshīvōt connurent leurs heures de gloire, au gré des vicissitudes et des errances des communautés juives à travers le monde.

L'existence de yeshīvōt est attestée en Afrique du Nord dès le viiie siècle. On en trouve (témoignage d'une vie culturelle intense) au xe siècle à Fès, à Tlemcen et à Kairouan — celle de cette ville était renommée entre toutes. Au xiie siècle, en Égypte, les Rashé-yeshīvōt, recteurs des académies, reprirent le titre de gaon (« Excellence »). Maimonide enseigna dans l'une d'entre elles. Au Proche-Orient, c'est Baghdād qui fut le grand centre des études talmudiques.

En Espagne, on connaît l'existence de telles yeshīvōt dès le viiie siècle. La ville de Lucène resta, durant trois siècles, le centre talmudique le plus réputé ; il fut dirigé au xie siècle par rabbi Isaac Alfassi (RIF) et fut fréquenté, par exemple, par le grammairien Ibn Djannah et par le poète Juda Halévi. Les yeshīvōt de Barcelone et de Tolède connurent leur âge d'or au xiiie et au xive siècle, sous la direction de rabbi Salomon ben Aderet et de rabbi Asher ben Ye'hiel.

Dans la Provence juive, c'est de la Yeshīvah de Narbonne que « la Torah sortait pour tous les pays » ; mais elle avait de sérieuses rivales à Arles, à Lunel, à Béziers, à Montpellier, à Marseille et à Perpignan, où vécut, au xiiie siècle, le grand talmudiste Mena'hem Haméiri. À ses débuts, le midi de la France était lié au centre franco-rhénan, adonné presque exclusivement aux études talmudiques et constitué par les écoles des successeurs de Rashi, les tossaphistes ; ceux-ci dirigèrent et illustrèrent les yeshīvōt de Troyes, d'Orléans, de Falaise, de Coucy, de Sens, de Chinon, de Paris. Celle de Paris, dirigée au xiiie siècle par rabbi Ye'hiel, comptait alors trois cents élèves.

En Allemagne, Rabbénou Guerchon (Meor Hagola) fonda, au xe siècle, à Mayence, une école qui forma les grands talmudistes français, allemands et italiens et qui prospéra pendant près d'un siècle. Aux xiie et xiiie siècles, on parle, entre autres, des yeshīvōt de Spire, de Ratisbonne, de Cologne, de Nuremberg... Les élèves, à cette époque, allaient couramment d'une yeshīvah à une autre : c'est ainsi qu'Isaac ben Moïse de Vienne visita celles de Prague, de[...]

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