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CHAHINE YOUSSEF (1926-2008)

Le rêve d'un « grand réalisme »

Lorsque, cédant aux exigences de Nasser, Chahine revient en Égypte en 1967 il reste toujours le réalisateur de Saladin. Aussi lui confie-t-on Ces Gens du Nil, la première et très officielle coproduction égypto-soviétique, tournée en 70 mm, superproduction pharaonique qui retrace la construction du barrage d'Assouan et loue les bienfaits du progrès. Malgré une faible marge de manœuvre, Chahine parvient à charger de sens le titre du film, en privilégiant les liens entre individus, hors de toute considération dogmatique. Refusé dans sa version originale par les gouvernements égyptien et soviétique, Ces Gens du Nil sortira en 1972 dans une version tronquée, avant d'être restauré dans sa version intégrale en 1996. Mal commencée, la deuxième période de la carrière de Chahine se prolonge avec trois œuvres majeures. Dans La Terre (1969), d'après un roman d'Abderrahman Charkaoui, par ailleurs scénariste de ses premiers films, Chahine, adoptant le registre de la fresque inspirée des grands modèles soviétiques (notamment Dovjenko), décrit, dans l'Égypte des années 1930 occupée par les Britanniques, la lutte meurtrière des paysans contre les riches propriétaires. Son film suivant, Le Choix (1970), d'après un scénario de Naguib Mahfouz, renoue avec la structure des Eaux noires en opposant deux frères, l'un artiste bohème et l'autre écrivain proche du pouvoir. Si le retour de Chahine en Égypte en 1967 coïncide avec la guerre de Six Jours, six ans s'écouleront avant qu'il évoque cette blessure nationale. Le Moineau (1973), dont le cadre se situe juste avant le conflit de juin 1967, retrace la quête d'un jeune policier dont le père adoptif est un responsable important des forces de l'ordre, tandis que son vrai père se révèle être un militant gauchiste. La quête d'identité du héros, associée à la présence de son demi-frère sur le front dans le Sinaï, va bien au-delà de la sphère intime : le film se conclut par le discours de Nasser annonçant la défaite de l'armée égyptienne.

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Écrit par

  • : critique de cinéma, maître de conférences en histoire et esthétique de cinéma, université de Paris-III-Sorbonne nouvelle

Classification

Autres références

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