LION YVES (1945- )
Né à Casablanca en 1945, Yves Lion obtient son diplôme d'architecte en 1972, et ouvre son agence à Paris en 1974. Il est associé à l'architecte canadien Alan Levitt depuis 1986. Après toute une série d'études que l'on qualifierait aujourd'hui de colossales, pour des villes nouvelles (3 000 logements à Marne-la-Vallée, 12 000 à L'Isle-d'Abeau près de Lyon) Yves Lion se fait remarquer à la fin des années 1970 par un petit programme de maisons en bande pour L'Isle-d'Abeau. Il y met en œuvre ce qui deviendra sa marque de fabrique : un rapport au site mûrement réfléchi, des plans compacts et simples, une expression honnête du logement social.
De 1980 à 1983, il réalise son premier édifice public, le Palais de justice de Draguignan. Sur un îlot triangulaire enchâssé dans le tissu médiéval, Lion parvient à hiérarchiser les éléments du programme autour d'une cour d'honneur. L'expression stylistique relève du néo-brutalisme et de James Stirling, mais aussi d'Auguste Perret, ce qui était moins courant à l'époque. Le recours à la pierre, à la tuile canal et aux jalousies manifeste par ailleurs le souci de renouer avec le vernaculaire. Yves Lion construit ensuite à Rochefort une série de maisons en bande dont le style concilie répétitivité moderne à la Pieter Oud et disposition banlieusarde du pavillon posé sur son garage. De 1981 à 1995, il réalise un équipement public colossal, le Palais de justice de Lyon à la Part-Dieu : une grande barre nord-sud prolongée par quatre redans arrondis, hommage à certains édifices de Tony Garnier. Le design sobre des salles d'audience veut exprimer la majesté de l'institution, et la salle des pas perdus évoque un hypocauste. Lion poursuit parallèlement son exploration du logement social, avec deux programmes le long du bassin de La Villette à Paris. Plutôt que de rivaliser avec les « boîtes à chaussures » voisines léguées par les années 1960, il a choisi des volumes simples, une modénature subtile et des matériaux discrets, mais coûteux.
De 1986 à 1992, l'atelier Lion se consacre au Palais des congrès de Nantes, bâtiment gigantesque supposé affirmer le rang de capitale régionale de la ville. Le parti est simple et radical à la fois, les détails sobres, les matériaux chics (du cuivre, du travertin, du marbre). L'édifice n'en reste pas moins isolé dans la ville, coincé entre un canal et une voie rapide. À la fin des années 1980, Lion réalise aussi un petit musée consacré à « l'amitié franco-américaine » dans le château de Blérancourt. À moitié vide et luxueux, il n'est pas sans analogie avec le Pavillon de Barcelone de Mies van der Rohe.
L'agence continue à réaliser des logements sociaux, comme à Villejuif, où Yves Lion met en pratique une théorie qui lui tient à cœur, celle de la « bande active » : il s'agit de disposer en façade les salles de bains, lesquelles éclairent en second jour les chambres à coucher. Dispositif certes ingénieux, mais qui ne semble guère avoir convaincu d'autres maîtres d'ouvrage. La force du projet réside davantage dans la prise de possession du site, l'intelligence de la distribution (duplex accessibles depuis un espace commun) et dans la simplicité des matériaux et des coloris. Qualités que l'on retrouve dans un programme de logements sociaux à Marne-la-Vallée en 1994, et surtout quai Henri-IV à Paris en 1998 pour le casernement de la Garde républicaine. Dans un site exceptionnel donnant au sud sur la Seine, à l'ouest sur Notre-Dame, avec le mont Valérien au loin, l'atelier Lion a réalisé plusieurs plots destinés à loger les gardes. Moins de couleurs, des formes plus simples, des détails maîtrisés : Yves Lion poursuit son travail de réduction vers l'archétype. Ce qui ne l'empêche nullement de jouer le jeu de l'intégration urbaine et du respect de l'existant, puisqu'il conserve[...]
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Écrit par
- Jean Claude GARCIAS : professeur à l'École spéciale d'architecture, Paris
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