Abonnez-vous à Universalis pour 1 euro

MONTAND YVES (1921-1991)

« ... Les souvenirs et les regrets aussi... »

Le succès d'Yves Montand se poursuivra sur le fond d'un engagement très explicite et sans ombres au côté du P.C.F., au moins jusqu'en 1956. S'il n'adhéra jamais au Parti communiste, il fut une star de gauche qui milita avec Simone Signoret pour la cause ouvrière ou encore contre le maccarthysme. Il entend néanmoins assurer un rôle critique auprès des dirigeants communistes en demandant par exemple à Khrouchtchev, au cours d'une tournée en U.R.S.S. (1956), des explications sur l'écrasement de l'insurrection hongroise par les chars russes, quelques mois après que le dirigeant soviétique eut publiquement reconnu les crimes de Staline au XXe congrès du P.C.U.S. À la fin des années 1950, l'attirance des États-Unis se fait très forte pour Montand : il va y devenir effectivement la star française que George Cukor engage pour Let's Make Love (Le Milliardaire, 1960) au côté de Marilyn Monroe, alors épouse du dramaturge Arthur Miller, dont Montand avait joué Les Sorcières de Salem. Idylle avec une femme culte, chronique tragique de l'adultère au royaume des stars internationales, quelques mauvais films... Montand revient alors en France pour ce qui va apparaître presque comme une nouvelle carrière, cinématographique notamment, où vont alterner ses talents de fantaisiste et les personnages à thèse. Les désillusions du militant communiste dans le très classique mais très daté La guerre est finie d'Alain Resnais (1966, sur un scénario de Jorge Semprún), la dénonciation du régime fasciste des colonels grecs dans le bravement didactique Z de Costa-Gavras (1969), ou le réquisitoire unilatéralement anticommuniste de L'Aveu (Costa-Gavras, 1970, d'après le roman d'Artur London) : Montand assume ces rôles avec l'aigreur et la sincérité vengeresses de quelqu'un qui comprend qu'il se trompe depuis vingt ans en prenant les mensonges staliniens pour la révolution des damnés de la terre. Le « coup de Prague » des Soviétiques en 1968 est d'ailleurs fatal aux dernières illusions de celui qui va désormais porter ses coups contre tous les régimes totalitaires. Dans le même temps, Philippe de Broca (Le Diable par la queue, 1969), Gérard Oury (La Folie des grandeurs, 1971), d'autres encore lui fournissent l'occasion de donner libre cours à sa verve de blagueur, toujours présente d'ailleurs dans ses prestations sur scène (ce dont témoignera plus tard le beau film de Chris Marker, La Solitude du chanteur de fond, 1974).

En 1962, ce perfectionniste, cet énorme travailleur qu'est Montand a connu à nouveau un triomphe au music-hall de l'Étoile. Tout au long des années 1950 et 1960, les disques auront imposé les grands succès inscrits aujourd'hui au patrimoine de la chanson française de qualité, bien davantage associés au nom de Montand qu'à celui de leurs compositeurs : aux connotations sociales du Petit Cireur de Broadway ou de Battling Joe répondent les accents du flâneur parisien des Grands Boulevards, d'À Paris (Francis Lemarque), de Luna Park, ainsi que les échos du romantisme populaire et du réalisme poétique de Prévert et Kosma dans Les Feuilles mortes ou Les Enfants qui s'aiment.

Les années 1970 et 1980 sont davantage marquées par une activité cinématographique d'un genre nouveau. Claude Sautet, humaniste, généreux, réaliste, propose à Montand des rôles où se joue le drame des gens ordinaires d'aujourd'hui, qui se sont bien sûr embourgeoisés au fur et à mesure que s'estompait de l'horizon sociologique français la figure mythique de l'ouvrier d'industrie : César et Rosalie (1972, avec Romy Schneider) tout comme Vincent, François, Paul et les autres... (1974, avec Serge Reggiani, Michel Piccoli, Gérard Depardieu) furent de forts succès populaires.[...]

La suite de cet article est accessible aux abonnés

  • Des contenus variés, complets et fiables
  • Accessible sur tous les écrans
  • Pas de publicité

Découvrez nos offres

Déjà abonné ? Se connecter

Écrit par

Classification

Autres références

  • ARRANGEURS DE LA CHANSON FRANÇAISE

    • Écrit par
    • 7 929 mots
    • 3 médias
    À la fin des années 1940, Bob Castella (1910-1993) devient le compagnon de route d’Yves Montand. Pianiste, accompagnateur, parfois arrangeur (Les Feuilles mortes) ou compositeur, il fut l’ami de tous les jours et l’homme de confiance du chanteur durant plus de quatre décennies.
  • PIAF ÉDITH (1915-1963)

    • Écrit par
    • 1 766 mots
    • 1 média
    En juillet 1944, elle rencontre Yves Montand. Elle lui écrit des chansons, met son équipe à son service, tourne avec lui en 1945 Étoile sans lumière, de Marcel Blistène, et exige qu'il figure en tête d'affiche au théâtre de l'Étoile. Elle le fait répéter des heures durant, l'impose à Marcel Carné...
  • SIGNORET SIMONE (1921-1985)

    • Écrit par
    • 1 754 mots
    Cependant, aux dogmatismes, Simone Signoret préfère les coups de cœur et d'indignation vécus au côté d'Yves Montand qu'elle a épousé – après avoir divorcé d'Yves Allégret –, à la suite d'une rencontre à Saint-Paul-de-Vence, en 1949. Elle l'accompagnera lors de sa fameuse tournée en U.R.S.S....