Z, film de Constantin Costa-Gavras
Après avoir été l'assistant d'Yves Allégret, de René Clair et de Jacques Demy, Costa-Gavras, né en 1933 à Athènes, réalise deux films : l'un policier, Compartiment tueurs, en 1965, et l'autre sur la Résistance, Un homme de trop, en 1967. À trente-cinq ans, il entreprend Z, un film pour lequel il peine à trouver une maison de production. En 1966, un scénario dépeignant le climat politique tendu avant l'arrivée au pouvoir des colonels grecs pouvait paraître rebutant. Mais l'enquête policière du film sur fond de campagne électorale remporte un énorme succès. La dénonciation à laquelle se livre Costa-Gavras, construite sur des faits réels, ouvre la voie à un genre nouveau, le cinéma engagé. Prix du jury à Cannes, prix de l'interprétation masculine pour le rôle du juge incarné par Jean-Louis Trintignant, le film est nominé aux oscars d'Hollywood.
Cinéma politique
Dénonçant les dérives et perversions d'un régime démocratique, cette chronique virulente adapte le livre éponyme de Vassili Vassilikos, qui relate l'assassinat, en mai 1963, à Thessalonique, du député Grigoris Lambrakis, membre de l'Union de la gauche démocratique. Le meurtre d'un homme politique libéral, renversé par un triporteur alors qu'il sortait d'une réunion publique, est déguisé en accident par la police. Mais sous la pression de Georges Papandréou, alors chef de l'opposition, le gouvernement de Constantin Caramanlis décide l'ouverture d'une enquête pour apaiser les tensions dans le pays. Le juge nommé, Christos Zartzetakis, remonte les arcanes de cet assassinat et s'acharne à faire éclater la vérité. Aidé dans ses investigations par un journaliste, il tire de certaines preuves irréfutables la conviction qu'il s'agit d'un meurtre commandité par l'extrême droite avec des complicités au sein de l'État. L'enquête conduira, malgré de nombreuses pressions, à l'arrestation des responsables de ce complot politique (officiers supérieurs, responsables de la police, hauts fonctionnaires).
Il existe assez peu de distorsions entre le film et les faits historiques, faiblement romancés, relatés par Vassilikos. D'ailleurs, le générique avertit le spectateur « que les similitudes avec des personnages et des faits réels ne sont pas accidentelles, mais volontaires ». Le titre « Z » – pour Zei « il vit » – fut un signe de reconnaissance pour l'opposition grecque. En octobre 1966 s'ouvrira le procès des commanditaires du meurtre, mais ces derniers seront tous réhabilités après le coup d'État des colonels grecs le 21 avril 1967. Kollias, procureur général à Salonique, qui avait souhaité étouffer l'affaire, sera ainsi promu président du conseil militaire. Les témoins seront déportés ou disparaîtront, tandis que le juge sera démis de ses fonctions. Le film, censé se passer dans un pays imaginaire, sera tourné à Alger en raison de ces circonstances.
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Écrit par
- Kristian FEIGELSON : maître de conférences, sociologue à l'université de Paris-III-Sorbonne nouvelle
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Autres références
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- Écrit par Christophe CHICLET
- 1 075 mots
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