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ZARZUELA

L' expression « désert musical » qui revient souvent pour décrire la situation de l'Espagne au xviie siècle est tout à fait injustifiée. En effet, les différentes formes d'expression musicale qui naissent alors dans ce pays sous l'impulsion des danses – folías, seguidillas, chaconas, passacalles, zarabandas, canarios... – forgent un répertoire d'une grande diversité qui rencontre un immense succès non seulement en Espagne mais également en dehors de la péninsule. Ces pièces dansantes serviront de terreau à des formes plus riches sur le plan de l'invention mélodique et rythmique. La zarzuela, forme typiquement espagnole d'expression dramatique mêlant musique et théâtre, chants et danses, participe de ce vaste mouvement de renouvellement et d'enrichissement du matériau musical.

Aux origines de la zarzuela : une musique au service du théâtre

Depuis ses origines, le théâtre espagnol associe la musique au texte littéraire. Bartolomé de Torres Naharro (1485 ?-1524 ?) et Lope de Rueda (1510 env.-1565) sont souvent considérés comme les premiers auteurs comiques espagnols. Torres Naharro semble être le premier à écrire des comédies dans la forme qui allait devenir classique et trouver son épanouissement avec Lope de Vega ; ses pièces sont en vers, tandis que celles de Rueda sont en prose. Au temps de Lope de Rueda, vers le milieu du xvie siècle, l'accompagnement musical des spectacles donnés sur la place publique est dévolu à une ou deux personnes qui chantent – avant ou après les farces, ou entre les actes d'une comédie – de vieilles romances en grattant de la guitare. Un document datant de 1593 atteste qu'une guitare et une viole constituent l'accompagnement indispensable d'un spectacle. Ce phénomène prend de l'ampleur dès le début du xviie siècle. On engage davantage de musiciens, la musique folklorique espagnole s'intègre de plus en plus au théâtre, qui en ce siècle d'or de la littérature espagnole apparaît sans conteste comme le genre artistique le plus achevé. Destin singulier que celui de la comedia espagnole du XVIIe siècle : avec le drame élisabéthain et la tragédie française classique, elle représente en effet un des trois grands théâtres inventés par l'Europe des Temps modernes. Les dramaturges Felix Lope de Vega Carpio (1562-1635), Tirso de Molina (1583-1648) et Pedro Calderón de la Barca (1600-1681) en sont les figures emblématiques. La comedia, d'une grande diversité, se veut à la mesure des goûts et des mœurs de son temps. Conçue pour répondre au jour le jour à la demande d'un public avide de nouveauté, elle présente une grande variété de registres : légendes, vies des saints, philosophie, intrigues parallèles.

Au regard de tout ce qui fait l'unité de la comédie, la musique joue un rôle essentiel et fédérateur par sa puissance d'évocation. Tantôt chantée, tantôt instrumentale, elle souligne les situations ou accompagne les danses liées à l'action. Lope de Vega occupe une place prépondérante dans l'histoire du théâtre lyrique espagnol en tant qu'auteur de La Selva sin amor (« Les Forêts sans amour »), une églogue donnée à la cour d'Espagne en présence de Philippe IV le 18 décembre 1627. Sa musique – composée conjointement par les Italiens Filippo Piccinini et Bernardo Monanni – en a malheureusement été perdue, mais, d'après Lope de Vega lui-même, sa pièce devait être chantée du début à la fin. Si les consignes du dramaturge ont été respectées par les compositeurs, La Selva sin amor apparaît bien comme le premier « opéra national » espagnol, et non pas comme une zarzuela, genre lyrique qui est caractérisé par l'alternance constante du parlé et du chanté. La Selva sin amor représente en tout cas, en Espagne, le premier essai d'introduction[...]

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Écrit par

  • : musicologue, analyste, cheffe de chœur diplômée du Conservatoire national supérieur de musique de Paris, chargée de cours à Columbia University, New York (États-Unis)

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Tomás Bretón - crédits : AKG-images

Tomás Bretón

<it>La Verbena de la paloma</it> - crédits : AKG-images

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