ZIGGOURAT
Monument caractéristique de la civilisation mésopotamienne, la ziggourat se présente sous la forme d'une tour à plusieurs étages, dont la finalité est religieuse (le terme est dérivé du verbe saqaru, « être haut »). On fixe généralement son apparition à l'époque de la IIIe dynastie d'Ur (env. ~ 2100/2000). Durant les IIe et Ier millénaires, chaque ville un peu importante de la Mésopotamie s'enorgueillissait d'en posséder au moins une. Mais, en dépit d'une documentation assez riche (une vingtaine de monuments), il faut insister sur les lacunes de notre connaissance. Notons d'abord une relative diversité des formules sans qu'il soit possible de discerner des règles générales de construction : les points communs qui unissent ces monuments sont leurs morphologie générale et les matériaux utilisés (briques crues pour le gros œuvre, nattes de roseaux en chaînage, briques cuites pour les coffrages extérieurs). Cependant, l'hétérogénéité des formules est évidente sur de nombreux autres points : base carrée ou rectangulaire, dimensions variant de 30 à 60 mètres pour chaque côté et de 40 à (peut-être) 100 mètres pour la hauteur, volume s'inscrivant dans une pyramide avec un nombre variable d'étages (de 4 à 7), revêtement de peinture ou de céramique à glaçure, présence d'emblèmes variés (cornes, etc.), l'accès aux étages se faisant par de majestueux escaliers à volée droite plaqués contre la façade ou installés perpendiculairement à elle, soit extérieurement et formant alors des excroissances (Ur), soit au sein même de la maçonnerie (Tchoga Zanbil). L'exceptionnelle conservation de la ziggourat de Tchoga Zanbil permet de se faire une idée assez précise de l'allure générale des ziggourats, mais les caractéristiques propres de ce monument empêchent de généraliser sans nuance les conclusions qu'on peut en tirer : en effet, alors que le procédé de construction habituel paraît être tout simplement la superposition de pyramides tronquées que l'on accumulait par plans successifs et en dégradé, on trouve à Tchoga Zanbil des étages emboîtés les uns dans les autres dans le plan vertical, en sorte que chacun reposait sur le sol. Cette technique, dont l'origine est inconnue et dont on ne voit pas très bien la raison, reste pour le moment une particularité élamite. Il faut aussi se rappeler qu'aucune ziggourat n'a été retrouvée entière et donc que les parties supérieures du monument sont hypothétiques : nous n'avons aucune certitude en ce qui concerne le couronnement de ces édifices et en ce domaine l'iconographie n'est pas venue relayer les lacunes de la documentation architecturale. Toutefois, la documentation épigraphique permet de penser qu'un édifice a surmonté la ziggourat et lui a donné sa raison d'être. La plus célèbre, mais aussi la plus ruinée des ziggourats, celle de Babylone qui a inspiré le mythe biblique de la tour de Babel, a fait l'objet d'un réexamen par l'architecte J. Vicari qui, en proposant une nouvelle interprétation des textes mésopotamiens et grecs qui la décrivent, lui a donné une proportion d'ensemble beaucoup plus vraisemblable que celle qui a été admise jusqu'à maintenant à partir des restitutions envisagées par les fouilleurs allemands. Quant à la ziggourat associée au palais de Dur Sharrukin (Khorsabad), il faut oublier la restitution qui en a été donnée au milieu du xixe siècle par les premiers fouilleurs (avec un escalier hélicoïdal) pour revenir à une explication plus classique du monument. L'apparition vers ~ 2100/2000 des premières grandes ziggourats représente-t-elle une pure invention ? Il est difficile de répondre à cette question parce que, pour l'époque des Dynasties archaïques (première moitié du IIIe millénaire)[...]
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Écrit par
- Jean-Claude MARGUERON : professeur des Universités
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