ZIMBABWE, site archéologique
Zimbabwe est le site archéologique le plus prestigieux de l'Afrique australe. Accrochées au flanc sud d'un haut plateau, à plus de 300 kilomètres au sud-est de Harare, les ruines occupent une surface d'environ 700 hectares dominée par une « Acropole » ceinte de murs de 7 mètres d'épaisseur. En contrebas, le « Grand enclos », délimité par un mur lui aussi très épais, en appareil régulier, décoré de chevrons, long d'environ 250 mètres enserre la célèbre « Tour conique », pleine, de 10 mètres de hauteur. Sur l'ensemble du site se trouvent des soubassements de huttes en pierre et des vestiges de constructions en pisé. Édifié loin des côtes, il fut ignoré des voyageurs portugais de l'Afrique (seul l'historien João de Barros l'évoque en 1552). Il fut, dès sa découverte en 1871 par le géologue Carl Mauch, au cœur d'un débat idéologique qui ne s'est éteint qu'avec l'indépendance de la Rhodésie du Sud (1980) qui prend alors son nom. En effet, pour Cecil Rhodes et pour les colons qui prirent possession du sud de l'Afrique, le site, par la qualité de son architecture et par la beauté des objets qui y furent trouvés, ne pouvait en aucun cas être l'œuvre des ancêtres des Africains qu'ils soumettaient. Une paternité antique lui fut d'emblée attribuée : les Phéniciens l'avaient édifié.
Il faut souligner que ce site n'est exceptionnel que par son imposante grandeur et par la qualité de ses constructions : l'ensemble du plateau rhodésien comporte en effet plus de 150 sites similaires, datant de la même époque. On a d'abord cru que l'existence de ces sites s'expliquait par la présence de mines d'or. Mais il a été démontré récemment que ces ensembles, qui existent aussi au Mozambique, en Afrique du Sud et au Botswana, sont en fait liés au contrôle des pâturages. Les habitants de Zimbabwe étaient avant tout des éleveurs, dont les troupeaux échappaient à la mouche tsé-tsé grâce à l'altitude ; ils pratiquaient une agriculture de complément. Puis, en continuité avec les fondateurs de Mapungubwe, ils se sont tournés vers l'extraction de l'or pour les musulmans de la côte Est. En échange, ils recevaient des perles provenant de l'Inde et des porcelaines du Golfe persique et de Chine. La monumentalité et la perfection technique des constructions ne sont que l'aboutissement, vers le milieu du xve siècle, d'un processus d'occupation du site par des constructions en terre, que l'on peut dater entre le ve et le viiie siècle. Cette architecture en pierre qui crée de véritables espaces urbains répond à l'accroissement de la population sur le site et au développement du commerce à longue distance. Il ne s'agit pas d'une architecture militaire mais plutôt de lieux clos dévolus à une ou à des « élites », dominant des établissements occupés par des éleveurs-paysans.
Bibliographie
P. J. J. Sinclair, Space, Time and Social Formation : a Territorial Approach to the Archaeology and Anthropology of Zimbabwe and Mozambique, 0-1700 AD, Societas Archaeologica Upsaliensis, Uppsala, 1987
P. J. J. Sinclair, I. Pikirayi, G. Pwiti & R. Soper, « Urban Trajectories on the Zimbabwean Plateau », in T. Shaw, P. Sinclair, B. Andah & A. Opkopo, The Archaeology of Africa : Food, Metals and Towns, Routledge, One World Archaeology, 1993.
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Écrit par
- Jean POLET : docteur ès lettres, maître de conférences associé à l'université de Paris-I
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Média