KODÁLY ZOLTÁN (1882-1967)
Le rayonnement international
Pendant les années trente se constitue autour de Kodály tout un mouvement de renouveau musical par le chant et pour le rajeunissement de l' enseignement. Les anciens élèves du maître y jouent un rôle très actif : Lajos Bárdos, avec György Kerényi et Gyula Kertész, fonde les éditions Magyar Kórus avec trois périodiques et d'innombrables publications. Jenő Ádám et Kerényi mettent au point la « méthode Kodály » d'enseignement et d'initiation musicale, tandis que d'autres élèves, à l'étranger, contribuent au rayonnement de sa musique et de ses idées, comme Antal Doráti, Géza Frid, Tibor Harsányi, Mátyás Seiber, Tibor Serly et, plus tard, Sándor Veress. À partir de cette époque, Kodály dirige de plus en plus fréquemment ses œuvres en Hongrie et à l'étranger. Ses compositions chorales prennent un nouvel essor (Ode à Franz Liszt, de Mihály Vörösmarty, 1936) et, pour la première fois, il écrit un motet sur des paroles bibliques en prose (Jésus et les marchands du Temple, 1934).
Durant cette période si fertile, Kodály trouve encore le temps de composer de la musique instrumentale : Danses de Marosszék pour piano (1927, version orchestrée en 1930), Danses de Galánta pour orchestre (1933), Prélude (1931) et Messe basse (1942) pour orgue, Variations symphoniques sur une mélodie populaire hongroise (1937-1938, pour le cinquantenaire de l'Orchestre du Concertgebouw d'Amsterdam à la demande de Willem Mengelberg), Concerto pour orchestre (1940, à la demande de F. Stock et de l'Orchestre de Chicago). En 1936, pour fêter le deux cent cinquantième anniversaire de la libération de Buda et de la fin de son occupation par les Turcs, Kodály compose son Te Deum pour solistes, chœur mixte, orchestre et orgue ; cette œuvre, la deuxième pour grand ensemble, a été commandée par la Ville de Budapest. La troisième sera la Missa brevis (1944).
Vers la fin des années trente, malgré la pression allemande qui se fait plus forte, l'école de Kodály s'affirme partout avec autorité. Surviennent l'Anschluss en 1938 et les lois raciales. Kodály et Bartók s'y opposent publiquement (avec trente autres intellectuels) et, l'année suivante, quittent les éditions Universal, devenues nazies, pour la maison Boosey & Hawkes. Bartók part en 1940 ; Kodály reste seul pour continuer leur œuvre commune. En 1942, le compositeur demande sa mise à la retraite pour se consacrer à l'édition systématique de la musique populaire hongroise. Mais sa carrière pédagogique n'est pas terminée : il enseignera encore le folklore musical.
En avril 1945, la Hongrie est libérée de l'occupation allemande ; commence alors une période de reconstruction fébrile et héroïque. Kodály continue son travail, mais sans Bartók. La perte de son compagnon, mort en 1945 aux États-Unis, pèsera lourdement sur lui. Durant les vingt et une années qui lui restent à vivre, il n'écrira que deux œuvres importantes : Zrinyi szózata (L'Appel de Zrinyi pour baryton solo et chœur mixte, 1954) et la Symphonie (probablement d'après des esquisses de jeunesse, 1961). Le reste de son œuvre se compose de chœurs et d'exercices de tous genres (pour la voix, le piano, de déchiffrage...).
Académicien, Kodály prend souvent la parole non seulement sur les sujets concernant l'éducation musicale, mais aussi sur ceux relatifs à la prononciation du hongrois et à la mémorisation de chants et textes ; il organise également des concours nationaux ou régionaux. Sa principale préoccupation reste cependant le Corpus musicae popularis hungaricae, dont les cinq premiers volumes paraissent de son vivant. Son activité est très appréciée par les nouvelles autorités hongroises, bien qu'il rencontre quelques difficultés à faire admettre ses idées entre 1950 et 1956. Il reçoit trois fois le prix[...]
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Écrit par
- Jean GERGELY : docteur ès lettres, professeur honoraire à l'Institut national des langues et civilisations orientales, administrateur de l'Association pour le développement des études finno-ougriennes, président du comité français Béla Bartók, compositeur, musicologue, ethnologue
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