- 1. Aristote et les origines de la science des animaux
- 2. La Renaissance, association des sciences antiques aux découvertes
- 3. La révolution technique du microscope
- 4. La zoologie moderne entre unité et morcellement
- 5. De la classification linnéenne à l'anatomie comparée
- 6. L'essor des institutions de recherche
- 7. Fragmentation de la zoologie en nombreuses disciplines
- 8. L'effacement temporaire de la zoologie
- 9. Crise de la biodiversité et renouveau de la zoologie
- 10. Les différents visages des zoologistes
- 11. La nomenclature zoologique
- 12. Bibliographie
ZOOLOGIE (HISTOIRE DE LA)
L'effacement temporaire de la zoologie
Au début des années 1960, la zoologie est devenue une discipline vieillotte, à la traîne des progrès scientifiques les plus marquants (ainsi de la découverte de l'ADN au début des années 1950) ; les postes de zoologistes sont peu à peu remplacés par des profils de généticiens. En 1961, l'Américain Clifford Ladd Prosser (1907-2002) se lamente du mauvais état de la zoologie dans son pays et souligne que cette discipline est la moins souvent choisie par les étudiants dans leur parcours universitaire et comme spécialité. Ce sentiment de crise doit être resitué à une époque où, toujours aux États-Unis, la place faite aux sciences a considérablement augmenté : le nombre de doctorats en sciences de la vie a triplé au cours des années 1950, pour tripler de nouveau durant la décennie suivante. La biologie des organismes a été délaissée au profit de la biologie moléculaire.
C'est dans ce contexte qu'est organisé à Washington, en août 1963, le 16e Congrès international de zoologie. L'étude des archives de cette manifestation montre que ses organisateurs poursuivaient deux objectifs : d'abord, tenter d'unifier et d'ordonner le chaos du champ de la zoologie en réunissant une multitude de sous-disciplines et de scientifiques aux objectifs, aux méthodes et aux réseaux très divers. Cette fragmentation, fruit de plus d'un siècle de spécialisation croissante, conduit en effet à une faible valorisation de la zoologie auprès du grand public et à une extrême fragilité de ses ressources financières. Le second objectif est de convaincre le public que la zoologie est utile et qu'elle est, au même titre que la physique ou la chimie, une science essentielle au bien-être humain. Les organisateurs choisissent comme emblème le phénix, dont la signification est curieusement soulignée par la devise : « Le phénix symbolise la réunion de la zoologie et de ses spécialités séparées. » Le Congrès de 1963 est un succès et réunit 2 500 participants, un exploit compte tenu de la diversité des objets d'étude, des méthodes utilisées, des situations professionnelles (les organismes de rattachement peuvent être des muséums, des universités, des organismes publics ou privés à but non lucratif, des industries...), des cultures nationales, des réseaux, des univers politiques...
Neuf ans plus tard, en 1972, le 17e Congrès international de Monte-Carlo marque l'échec complet de cette tentative, ses actes ne sont même pas publiés. Peu à peu, le mot zoologie disparaît d'un grand nombre d'instituts ou de laboratoires et il faut attendre vingt-huit ans pour que le 18e Congrès international de zoologie puisse être organisé à Athènes en 2000. Entre-temps, le monde a changé et la crise environnementale, qui s'est imposée dans les consciences comme dans les agendas des responsables politiques et scientifiques, va conduire à une revitalisation profonde de la zoologie.
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Écrit par
- Valérie CHANSIGAUD : docteur en sciences de l'environnement, historienne des sciences et de l'environnement, chercheuse associée au laboratoire SPHERE, CNRS, UMR 7219, université de Paris-VII-Denis-Diderot
Classification
Médias