11-30 avril 1996
Israël - Liban. Vaste opération de Tsahal contre le Hezbollah
Le 11, l'aviation israélienne bombarde des positions du Hezbollah au Liban, dont l'un des bastions de l'organisation chiite pro-iranienne situé dans la banlieue sud de Beyrouth. C'est la première fois depuis l'invasion israélienne de juin 1982 que Tsahal s'en prend à un objectif aussi proche de la capitale libanaise. Le lancement de cette opération, baptisée « Raisins de la colère », fait suite à une recrudescence des accrochages dans la « zone de sécurité » contrôlée depuis mars 1978 par l'Armée du Liban Sud (A.L.S.), alliée de Tsahal, à la frontière entre les deux pays. Le précédent affrontement de grande ampleur dans le sud du Liban remonte à juillet 1993. Au terme de celui-ci, Israël et le Hezbollah et étaient convenus tacitement, sous l'égide des États-Unis, de limiter leurs opérations militaires à la « zone de sécurité », afin d'épargner les civils.
Le 12, le Hezbollah riposte en tirant des roquettes sur le nord d'Israël. Tsahal poursuit ses bombardements, provoquant la fuite de centaines de milliers de civils. Le Premier ministre libanais Rafik Hariri reconnaît que l'opération israélienne vise à forcer son gouvernement à désarmer le Hezbollah, ce à quoi il se refuse tant que Tsahal occupe une partie du territoire, arguant que c'est à l'armée libanaise d'assurer la sécurité à sa frontière sud. Constatant l'« encouragement » prodigué par Washington à Jérusalem, Beyrouth demande l'intervention diplomatique de Paris.
Le 14, à la suite d'un entretien, à Paris, avec Rafik Hariri, le président Chirac, qui se trouvait en visite au Liban du 4 au 6, décide de confier une mission d'information au ministre des Affaires étrangères Hervé de Charette.
Le 15, les États-Unis annoncent à leur tour leur intention d'entamer des démarches diplomatiques.
Le 16, Washington présente un projet de règlement qui prévoit l'arrêt de l'opération « Raisins de la colère » en échange de l'engagement par Beyrouth et Damas d'interdire au Hezbollah toute attaque contre Israël et la « zone de sécurité ». De son côté, Paris propose de formaliser par écrit, entre Israël et le Liban, l'accord tacite de 1993 et de demander à des pays tiers d'en garantir le respect.
Le 18, le bombardement par l'artillerie israélienne d'un camp de la F.I.N.U.L. où se trouvaient de nombreux réfugiés, à Cana, dans le sud du Liban, provoque la mort d'une centaine de civils. Le soir même, tandis que les États-Unis, la France et les Nations unies demandent l'arrêt immédiat des hostilités, le cabinet restreint israélien charge Shimon Peres de négocier un cessez-le-feu.
Le 20, les ministres des Affaires étrangères américain, russe, français et italien – représentant l'Union européenne – se réunissent à Damas, autour du président Hafez el-Assad ; jusque-là très discret. Hervé de Charette rencontre également son homologue iranien. De son côté, Israël affirme sa préférence pour « un seul canal de négociations, qui passe par les États-Unis ».
Le 26, les Premiers ministres israélien et libanais annoncent la conclusion d'un « arrangement » écrit, bâti sur le modèle de celui de 1993. Le texte, qui se présente sous la forme d'une proposition américaine, prévoit que « les groupes armés au Liban » – le Hezbollah n'est pas cité – n'attaqueront plus Israël et que l'État juif « et ceux qui coopèrent avec lui » – ni l'A.L.S. ni la « zone de sécurité » ne sont mentionnées – ne viseront plus aucun objectif civil au Liban. Un « groupe de surveillance » composé des États-Unis, de la France, de la Syrie, du Liban et d'Israël est chargé de veiller sur la mise en œuvre de l'arrangement. Les gouvernements israélien et libanais doivent approuver le texte par des lettres séparées adressées au médiateur américain. Le cessez-le-feu entre en vigueur le 27.
Le 30, les Libanais de tous bords et de toutes confessions, officiels et anonymes mêlés, rendent hommage aux victimes de Cana, au cours d'une cérémonie solennelle à Tyr.