13-27 novembre 2015
France. Attentats terroristes à Paris et Saint-Denis
Le 13, Paris et Saint-Denis (Seine-Saint-Denis) sont le théâtre d’attentats meurtriers simultanés commis par trois groupes d’hommes. Un premier groupe intervient à partir de 21 h 20 près du Stade de France à Saint-Denis, où se déroule un match amical de football entre la France et l’Allemagne en présence du président François Hollande. Deux kamikazes font exploser leur charge à l’extérieur du stade. Le chef de l’État est aussitôt évacué, tandis que la rencontre se poursuit pour éviter toute panique. Une personne est tuée dans les explosions. Un troisième homme actionnera sa ceinture d’explosifs vers 21 h 55 dans le même quartier. Ce groupe était composé d’un Français résidant en Belgique – où il était fiché – et ayant séjourné en Syrie, Bilal Hadfi, et de deux possesseurs de faux passeports syriens entrés en Europe via la Grèce en octobre. À partir de 21 h 25, un deuxième groupe de trois personnes circulant à bord d’une voiture immatriculée en Belgique ouvre le feu sur des clients attablés aux terrasses de bars et de restaurants des Xe et XIe arrondissements de Paris – Le Carillon, Le Petit Cambodge, La Bonne Bière, Casa Nostra et La Belle Équipe –, tuant une quarantaine de personnes. Puis un des assaillants actionne sa ceinture d’explosifs dans un bar du boulevard Voltaire, le Comptoir Voltaire. Il s’agit d’un Français résidant et fiché en Belgique, Brahim Abdeslam. Vers 21 h 40, un troisième groupe de trois hommes arrivés également à bord d’une voiture immatriculée en Belgique pénètre dans la salle de spectacle du Bataclan, boulevard Voltaire, où le groupe de rock californien Eagles of Death Metal donne un concert. Les terroristes tirent sur les spectateurs, dont une partie parvient à s’enfuir ou à se mettre à l’abri. Près de quatre-vingt-dix personnes sont tuées. La police intervient une première fois vers 22 h, tuant un des terroristes dont la ceinture d’explosifs se déclenche ; il sera identifié le 9 décembre comme étant Foued Mohamed-Aggad, un Français parti en Syrie. Les deux autres assaillants se retranchent à l’étage avec des otages. Depuis l’Élysée, le président François Hollande fait une première déclaration peu avant minuit dénonçant l’« épreuve terrible qui, une nouvelle fois, nous assaille ». Il annonce les deux décisions qui vont être prises : l’état d’urgence et la fermeture des frontières.
Le 14, peu après 0 h, alors que l’attaque du Bataclan est toujours en cours, le chef de l’État convoque un Conseil des ministres qui décrète l’état d’urgence sur tout le territoire – mis en place cinq fois seulement depuis son instauration par une loi d’avril 1955. À 0 h 20, la police donne l’assaut à la salle du Bataclan et tue les deux derniers terroristes. Il s’agit de Français ayant séjourné en Syrie, Samy Amimour et Ismaël Omar Mostefaï. Ces attentats, les plus meurtriers dans le pays depuis la Seconde Guerre mondiale, font cent trente morts et plus de trois cent cinquante blessés. François Hollande se rend aussitôt devant le Bataclan.
Le 14 également, les partis politiques annoncent la suspension de leur campagne en vue des élections régionales. De nombreux gouvernements étrangers expriment leur solidarité. Trois jours de deuil national sont décrétés. Les lieux accueillant du public resteront fermés durant tout le week-end. Dans une seconde déclaration, François Hollande affirme que ces attentats sont « un acte de guerre qui a été préparé, organisé, planifié de l’extérieur avec des complicités intérieures ». Un communiqué émanant de l’organisation État islamique (E.I.) revendique les attaques contre « la capitale des abominations et de la perversité, celle qui porte la bannière de la croix en Europe ». Les deux voix entendues dans le message seront identifiées comme celles des Français Fabien et Jean-Michel Clain, partis en Syrie. Les enquêteurs identifient l’homme qui a loué les voitures utilisées lors des attaques. Il s’agit du Français résidant et fiché en Belgique Salah Abdeslam, frère d’un des kamikazes, qui a repassé la frontière après les attentats avant de disparaître, aidé par deux Belges. Ceux-ci sont arrêtés par la police belge à Molenbeek-Saint-Jean, dans la banlieue de Bruxelles. Les enquêteurs belges recherchent un autre djihadiste, le Belgo-Marocain Abdelhamid Abaaoud, également originaire de Molenbeek, chef présumé de la cellule de Verviers démantelée en janvier.
Le 15, de nombreuses perquisitions administratives sont menées sur le territoire – ces opérations continuent les jours suivants –, donnant lieu à des gardes à vue et des assignations à résidence, ainsi qu’à des saisies d’armes. François Hollande reçoit à l’Élysée les présidents des deux chambres et les dirigeants des principaux partis politiques. Des milliers de personnes se rassemblent spontanément place de la République, à Paris, en hommage aux victimes des attentats.
Le 15 également, dans la soirée, l’armée de l’air mène un premier raid contre Raqqa, en Syrie, une des « capitales » de l’E.I. D’autres raids contre des positions de l’organisation seront conduits les jours suivants par l’aviation française.
Le 16, une minute de silence est observée à midi à travers toute l’Europe, à l’appel de l’Union européenne. François Hollande s’exprime ensuite devant le Congrès convoqué à Versailles à sa demande. Dans un discours au ton ferme, il déclare que « la France est en guerre » et affirme sa volonté d’« éradiquer, dans le respect de nos valeurs, le terrorisme ». Il annonce qu’un projet de loi prévoyant de prolonger de trois mois l’état d’urgence sera soumis prochainement au Parlement et indique son intention de modifier la Constitution afin d’instituer un régime d’« état de crise » distinct des « pouvoirs exceptionnels » accordés au chef de l’État par l’article 16 de la Loi fondamentale et de l’« état de siège » prévu par l’article 36. Il évoque également la possibilité d’adopter certaines mesures à l’encontre des djihadistes français telles que la déchéance de nationalité pour les binationaux, la restriction du droit de retour sur le territoire et l’obligation de porter un bracelet électronique pour les individus faisant l’objet d’une « fiche S », c’est-à-dire soupçonnés d’atteinte à la sûreté de l’État. Il s’engage également à créer cinq mille postes supplémentaires de policiers et de gendarmes en deux ans, à suspendre jusqu’en 2019 la diminution des effectifs de l’armée et à étudier la création d’une garde nationale composée de réservistes. Évoquant le surcoût budgétaire lié à ces mesures, il affirme que « le pacte de sécurité l’emporte sur le pacte de stabilité » – allusion aux mesures d’économie budgétaire imposées par Bruxelles. Sur le plan diplomatique et militaire, François Hollande prône le « rassemblement de tous ceux qui peuvent réellement lutter contre cette armée terroriste dans le cadre d’une grande et unique coalition », n’excluant plus de s’allier pour cela avec la Russie. Il appelle à l’adoption d’une résolution par le Conseil de sécurité de l’O.N.U. et à la mise en œuvre de la solidarité européenne prévue par le traité de Lisbonne.
Le 18, la police lance un assaut contre un appartement du centre de Saint-Denis. Trois personnes sont tuées. Les analyses permettront d’identifier Abdelhamid Abaaoud, soupçonné d’être le commanditaire des attentats et un des membres du commando qui a mitraillé les restaurants des Xe et XIe arrondissements, ainsi que sa cousine française Hasna Aït-Boulahcen ; le troisième corps n’est pas identifié.
Le 19, l’Assemblée nationale vote par 551 voix contre 6 et une abstention la prolongation et le renforcement de l’état d’urgence. Le Sénat fera de même le 20 par 336 voix et 12 abstentions. Le texte prévoit notamment qu’une assignation à résidence pourra être imposée à toute personne dont le « comportement constitue une menace » pour la sécurité et l’ordre public.
Le 23, une ceinture d’explosifs est retrouvée par des éboueurs à Montrouge (Hauts-de-Seine). Les enquêteurs estiment qu’elle a pu avoir été portée par Salah Abdeslam.
Le 23 également, François Hollande reçoit le Premier ministre britannique David Cameron. Le 24, il se rend à Washington pour rencontrer le président Barack Obama. Le 25, il accueille la chancelière allemande Angela Merkel à Paris. Le 26, il se rend à Moscou pour s’entretenir avec le président Vladimir Poutine. Cette activité diplomatique vise à mettre en place la « grande coalition » contre l’E.I. que le chef de l’État appelle de ses vœux.
Le 27, François Hollande préside une cérémonie solennelle d’hommage aux victimes des attentats dans la cour d’honneur de l’Hôtel des Invalides, à Paris.