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15-29 novembre 1995

France. Vaste mouvement de protestation autour du plan de réforme de la Sécurité sociale

Le 15, à l'issue de trois jours de débats parlementaires, le Premier ministre, Alain Juppé, présente aux députés son plan de réforme de la Sécurité sociale, dont le déficit cumulé doit atteindre 230 milliards de francs à la fin de 1995. Les principales mesures destinées à réduire ce déficit sont : le report à janvier 1997 de la prestation autonomie destinée aux personnes âgées dépendantes ; l'instauration, pour une durée de treize ans, d'un prélèvement de remboursement de la dette sociale (R.D.S.) de 0,5 p. 100 sur tous les revenus ; l'alignement de la durée de cotisation des fonctionnaires sur celle des salariés du secteur privé, soit quarante ans au lieu de trente-sept ans et demi ; le vote par le Parlement, chaque année, d'une enveloppe globale de dépenses sociales qui doit s'imposer aux caisses d'assurance-maladie, aux médecins, aux hôpitaux et aux patients, ce qui nécessite une révision constitutionnelle ; l'augmentation de la cotisation maladie des retraités et des chômeurs rémunérés au-dessus du S.M.I.C. ; le gel des prestations familiales en 1996 et leur imposition à partir de 1997 ; la création d'un seul régime d'assurance-maladie qui doit unifier les régimes particuliers ; le financement progressif par la C.S.G., et non plus par les salaires, de l'assurance-maladie ; la généraliation du carnet médical. Le plan Juppé prévoit également des réformes structurelles dans la gestion de la Sécurité sociale : l'action des partenaires sociaux, gestionnaires des caisses, doit être plus strictement encadrée par l'État et le Parlement. À l'issue de la présentation de son plan, qui surprend par son ampleur, le Premier ministre engage avec succès la responsabilité de son gouvernement. Alain Juppé envisge de réformer la Sécurité sociale partiellement par le biais d'ordonnances. Le Parti socialiste juge le « plan Juppé » inéquitable. Placées devant le fait accompli, les fédérations syndicales de fonctionnaires appellent aussitôt à des mouvements de protestation. Marc Blondel, secrétaire général de Force ouvrière (F.O.), dénonce le plan Juppé qui prévoit que les directeurs des caisses locales d'assurance-maladie, contrôlées aux deux tiers par F.O., seront désormais nommés par les directeurs des trois caisses nationales, eux-mêmes désignés en Conseil des ministres. De son côté, Nicole Notat, secrétaire générale de la C.F.D.T., approuve les orientations générales du plan du Premier ministre, ce qui lui vaut d'être critiquée au sein même de sa Confédération.

Le 24, les fédérations de fonctionnaires, à l'exception de F.O., appellent à une journée de grève afin de protester contre le projet de réforme des retraites. Des agents de plusieurs services publics – E.D.F.-G.D.F., La Poste, France Télécom, la R.A.T.P. et la S.N.C.F. – ainsi que des étudiants et des salariés du secteur privé, qui répondent au mot d'ordre interprofessionnel de la C.G.T. contre le plan Juppé, s'associent à cette journée d'action. Les manifestations rassemblent près de 500 000 personnes dans les rues de Paris et des grandes villes ; 37 p. 100 seulement des fonctionnaires suivent le mot d'ordre syndical, contre 55 p. 100 lors de la journée d'action contre le gel des salaires, le 10 octobre.

Le 28, F.O., soutenue par la C.G.T. et la Fédération syndicale unitaire (F.S.U.), organise, à son tour, une journée de grève interprofessionnelle contre le projet de réforme de la Sécurité sociale.

Le 29, lors de l'installation de la commission de réforme des régimes spéciaux de retraite, Alain Juppé déclare, au sujet des réformes qu'il juge « incontournables », que « les repousser une fois encore, comme on l'a fait depuis quinze ans, ce serait à coup sûr accepter le déclin ». Au cours des derniers jours du mois, les agents de la R.A.T.P., de La Poste et d'E.D.F.-G.D.F. entrent peu à peu dans la grève. Dans le même temps, des divergences apparaissent parmi les fédérations de fonctionnaires. Alors que la C.G.T., F.O., la F.S.U. et l'Union syndicale des syndicats autonomes exigent le retrait du plan de réforme de la Sécurité sociale et envisagent la généralisation de la grève, la C.F.D.T., la C.F.T.C. et la C.G.C. centrent leurs revendications sur la défense de l'emploi, du pouvoir d'achat et des retraites, et refusent de rejeter le plan Juppé dans son ensemble.

—  ENCYCLOPÆDIA UNIVERSALIS

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