15 février-1er mars 1995
Burundi. Maintien de la pression des Tutsi sur le pouvoir
Le 15, le Premier ministre Anatole Kanyenkiko, un Tutsi modéré qui dirigeait depuis septembre 1994 un gouvernement d'union nationale, présente sa démission. Il cède ainsi à la pression de son ancien parti, l'Unité pour le progrès national (Uprona, tutsi), qui l'accusait d'être inféodé à la majorité hutu (85 p. 100 de la population). Selon l'Uprona, cette situation rompait le pacte national qui réserve le poste de président à un Hutu et celui de Premier ministre à un représentant de la minorité tutsi (14 p. 100 de la population). Décidée à provoquer à tout prix le renversement du gouvernement, l'Uprona avait déclenché, la veille, une grève générale que ses militants faisaient respecter par la force. La formation tutsi avait déjà obtenu, en décembre 1994, le départ de la présidence de l'Assemblée nationale de Jean Minani, un Hutu qu'elle accusait d'avoir encouragé les massacres consécutifs à l'assassinat du premier président démocratiquement élu, le Hutu Melchior Ndadaye, en octobre 1993. Depuis ce coup d'État militaire manqué – l'armée est à dominante tutsi –, l'Uprona tente par tous les moyens de regagner le pouvoir perdu lors des premières élections pluralistes, en juin 1993.
Le 19, le président Sylvestre Ntibantunganya, chef du Front pour la démocratie au Burundi (Frodebu, hutu), dénonce l'activité des extrémistes et met en garde contre le risque d'une réédition, au Burundi, de la tragédie dont a été victime le Rwanda voisin en 1993.
Le 23, le chef de l'État nomme Premier ministre Antoine Nduwayo, candidat désigné de l'Uprona, qui présente, le 1er mars, un gouvernement comprenant la plupart des ministres sortants.