1er-27 novembre 1995
Bosnie-Herzégovine. Conclusion à Dayton d'un accord de paix
Le 1er, les présidents bosniaque Alija Izetbegović, croate Franjo Tudjman et serbe Slobodan Milošević entament les négociations sur le règlement de la crise yougoslave sur une base aérienne proche de Dayton (Ohio), aux États-Unis, comme le prévoyait l'accord de cessez-le-feu conclu en octobre.
Le 8, le secrétaire américain à la Défense, William Perry, et le ministre russe de la Défense, Pavel Gratchev, annoncent qu'ils sont parvenus à un compromis sur la participation de troupes russes à la force internationale de paix – Implementation Force (Ifor) – qui devra veiller à l'application du futur accord de paix en Bosnie. Environ 1 500 soldats russes, placés sous le contrôle opérationnel du commandant en chef américain de l'Ifor, participeront à l'opération Joint Endeavour (« Effort concerté ») au sein de la division américaine. Selon un nouvel accord, qui interviendra le 28, les troupes russes seront placées sous le « contrôle politique » d'un « comité consultatif » composé de représentants de la Russie et de l'O.T.A.N.
Le 10, Alija Izetbegović et le président de la Fédération croato-musulmane, Kresimir Zubak, signent un accord qui concrétise l'existence de cette Fédération, créée en mars 1994 sous l'égide des États-Unis en vue de mettre fin au conflit croato-musulman.
Le 12, les Croates et les Serbes séparatistes de Slavonie orientale, dernier territoire croate dont le contrôle échappait à Zagreb, signent un accord qui prévoit que la région sera démilitarisée et administrée par l'O.N.U. pendant une période d'un an, jusqu'à l'organisation d'élections libres, avant de revenir sous l'autorité de la Croatie.
Le 13, le Tribunal pénal international sur l'ex-Yougoslavie (T.P.I.) inculpe de crimes de guerre et crimes contre l'humanité – perpétrés à l'encontre de Musulmans – le chef d'état-major des forces croates de Bosnie, Tihomir Blaskić, et le président du Parti de la communauté croate de Bosnie, Dario Kordić.
Le 16, le T.P.I. inculpe à nouveau Radovan Karadzić et Ratko Mladić, respectivement « président » de la « république serbe de Bosnie » et commandant en chef des forces armées serbes bosniaques, pour le massacre d'« au moins six mille » Musulmans par leurs troupes lors de la chute de Srebrenica en juillet. Radovan Karadzić et Ratko Mladić avaient déjà été inculpés, en juillet, de génocide et de crimes contre l'humanité devant le T.P.I. pour les assassinats de civils, à Sarajevo, et les prises en otage de casques bleus.
Le 21, après un ultimatum des États-Unis, un accord de paix est conclu par les présidents bosniaque, croate et serbe. Le texte prévoit le maintien de l'unité de la Bosnie composée de deux entités, l'une croato-musulmane (51 p. 100 du territoire), l'autre serbe (49 p. 100 du territoire), avec Sarajevo réunifiée comme capitale ; les deux chambres du Parlement seront élues en 1996 ; les criminels de guerre seront exclus des fonctions publiques ; les personnes déplacées ou réfugiées devront pouvoir regagner leur domicile ; un corridor reliera l'entité croato-musulmane à l'enclave de Goražde. La largeur du corridor de Posavina, reliant certains territoires serbes bosniaques à la Serbie, est fixée à 5 kilomètres. Forte de 63 000 hommes, l'Ifor est chargée de contrôler le cessez-le-feu et la séparation des belligérants. Les forces étrangères doivent quitter la Bosnie. Les prisonniers doivent être libérés. Un dispositif de contrôle des armements et de limitation des importations d'armes est prévu. Le président du « Parlement » de Pale, Momcilo Krajisnik, rejette l'accord négocié au nom des Serbes de Bosnie par Slobodan Milošević. Les Serbes de Sarajevo contestent le rattachement des quartiers qu'ils contrôlent au reste de la capitale bosniaque.
Le 22, le Conseil de sécurité de l'O.N.U. adopte la résolution 1021 – seule la Russie s'abstient – qui prévoit la levée progressive de l'embargo sur les armes à destination de l'ex-Yougoslavie, imposé en septembre 1991 ; il adopte à l'unanimité, le 23, la résolution 1022 qui suspend indéfiniment les sanctions économiques imposées à la Serbie et aux Serbes de Bosnie en mai 1992.
Le 27, dans un « discours à la nation » sur la Bosnie, le président américain Clinton explique à ses compatriotes que la participation à l'Ifor correspond aux « intérêts stratégiques » des États-Unis et contribue à l'affirmation du « leadership de l'Amérique ». Il écarte tout risque d'enlisement, la mission de la force internationale étant « claire, limitée et réalisable ».