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1er-31 août 2004

Irak. Épreuve de force à Nadjaf et enlèvement de journalistes français

Le 1er, à Bagdad, Mossoul et Kirkouk, une série de six attentats à la bombe coordonnés visent des églises et des institutions chrétiennes, faisant une dizaine de morts.

Le 5, la reprise des affrontements entre les forces américaines et l'Armée du Mahdi, la milice de l'imam radical Moqtada Al-Sadr, dans diverses villes chiites, illustre la rupture de la trêve conclue en mai. Les jours suivants, les forces de la coalition établissent le siège de Nadjaf, ville sainte défendue par les miliciens chiites.

Le 7, le gouvernement intérimaire annonce le rétablissement de la peine de mort pour les crimes les plus graves, ainsi que l'ouverture pendant trente jours d'une période d'amnistie au bénéfice des seules personnes ayant fourni une aide à la guérilla.

Le 12, à Nadjaf, après avoir demandé aux civils, la veille, d'évacuer les zones de combats, les forces américaines et irakiennes donnent l'assaut aux positions tenues par les miliciens de l'Armée du Mahdi, retranchés dans le mausolée de l'imam Ali et dans le cimetière de la ville.

Le 13, les belligérants concluent un cessez-le-feu à Nadjaf. Des violences meurtrières se poursuivent toutefois dans d'autres villes chiites ainsi que dans le « triangle sunnite ».

Le 15, dans un climat très tendu, s'ouvre à Bagdad la Conférence nationale qui réunit quelque mille trois cents délégués. Qualifiée de « premier pas » vers la démocratie par le président Ghazi Al-Yaouar, elle est chargée de désigner un Conseil national intérimaire qui supervisera l'action du gouvernement. Elle a également pour mission de préparer les élections prévues pour janvier 2005.

Le 15 également, à la suite de l'échec des négociations avec l'Armée du Mahdi, le gouvernement intérimaire annonce une « offensive majeure » contre Nadjaf et enjoint aux journalistes de quitter la ville.

Le 16, la Conférence nationale vote en faveur de l'envoi d'une délégation auprès de Moqtada Al-Sadr pour lui demander de se retirer de Nadjaf, de déposer les armes et de transformer sa milice en parti politique. Toutefois celle-ci ne parviendra pas, le 17, à rencontrer l'imam rebelle. De son côté, l'Armée du Mahdi dit s'en remettre, pour son retrait de la ville, à la décision de la Marjaiya, la plus haute instance religieuse chiite irakienne que dirige notamment l'ayatollah Ali Al-Sistani.

Le 18, la Conférence nationale désigne sans vote la liste des membres du Conseil national intérimaire établie par les organisateurs, après avoir échoué à constituer des listes concurrentes. Les délégués indépendants, qui ont dû retirer leur liste parce qu'elle ne remplissait pas toutes les conditions requises, dénoncent « la dictature des grands partis ».

Le 18 également, Moqtada Al-Sadr affirme accepter de se retirer de Nadjaf à certaines conditions. Les discussions continuent les jours suivants, tandis que des combats meurtriers se poursuivent.

Le 18 toujours, la chaîne qatarie Al-Jazira diffuse une vidéo dans laquelle les Escadrons des martyrs, un groupe islamiste jusque-là inconnu, menacent de tuer le journaliste américain Micah Garen, enlevé à Nassirya le 14, si les forces américaines ne se retirent pas de Nadjaf.

À partir du 23, à Nadjaf, les combats s'intensifient autour du mausolée d'Ali. Deux jours plus tard, il sera entièrement encerclé par les forces américaines et irakiennes.

Le 24, Al-Jazira diffuse une vidéo dans laquelle le groupe l'Armée islamique en Irak, qui détient plusieurs otages étrangers, menace de tuer le journaliste italien Enzo Baldoni, enlevé le 19, si Rome ne retire pas d'Irak ses trois mille soldats dans les quarante-huit heures.

Le 24 également, le groupe de travail sur les conditions de détention des prisonniers des forces américaines en Irak, en Afghanistan et sur la base de Guantanamo, présidé par l'ancien chef du Pentagone James Schlesinger, rend son rapport au secrétaire à la Défense Donald Rumsfeld. Au sujet des sévices infligés aux détenus de la prison d'Abou Ghraib, il met en cause la responsabilité des officiers sur le terrain et de l'état-major. Il relève surtout « une responsabilité institutionnelle et personnelle aux plus hauts niveaux », exonérant toutefois Donald Rumsfeld et son cabinet de toute charge.

Le 25 est rendu public le rapport de trois généraux de l'armée de terre américaine sur les violences perpétrées dans la prison d'Abou Ghraib. Utilisant le terme de « torture », il met en cause plus de cinquante militaires et civils, notamment des officiers supérieurs du renseignement militaire et des agents de la C.I.A., et montre que les sévices s'inscrivaient dans le cadre d'interrogatoires. Le rapport juge le général Ricardo Sanchez, alors commandant des forces de la coalition en Irak, « responsable » mais non « coupable » de ces actes.

Le 26, l'ayatollah Al-Sistani, de retour de Londres où il était hospitalisé, prend la tête, à Bassorah, d'une marche de plusieurs milliers de fidèles en direction du mausolée d'Ali, afin d'obtenir la fin des combats. Il prône le départ des miliciens chiites et des forces américaines des villes de Nadjaf et de sa voisine Koufa – où se déroulent des combats meurtriers –, la prise en charge de la sécurité dans ces villes par la police irakienne et le dédommagement des personnes affectées par les combats.

Le 26 également, Enzo Baldoni est tué par ses ravisseurs au terme de l'ultimatum annoncé. Il est le onzième otage étranger à être assassiné en Irak depuis avril.

Le 27, après trois semaines de combats meurtriers au bilan difficilement quantifiable, les miliciens de l'Armée du Mahdi quittent l'enceinte du mausolée d'Ali, en application de l'accord conclu la veille sous l'égide de l'ayatollah Al-Sistani. Toutefois, ils ne rendent pas leurs armes.

Le 28, Al-Jazira diffuse une vidéo dans laquelle l'Armée islamique en Irak revendique l'enlèvement de deux journalistes français, Christian Chesnot, correspondant de Radio France Internationale, et Georges Malbrunot, grand reporter au Figaro, disparus depuis le 20 avec leur chauffeur syrien. Le groupe islamiste menace de les tuer si la France n'annule pas dans les quarante-huit heures sa « loi sur le voile » à l'école, qualifiée d'« agression contre l'islam ».

Le 30, les ravisseurs des deux journalistes français repoussent leur ultimatum. Le gouvernement français obtient le soutien de nombreux responsables politiques et religieux, tant en France même que dans le monde arabe.

Le 30 également, Moqtada Al-Sadr annonce que sa milice se retire des combats en Irak, notamment à Sadr City, le quartier chiite de Bagdad, où un accord de paix intervient le même jour. Il annonce également « l'entrée de son mouvement dans le processus politique ».

Le 31, un site Internet diffuse les images de la mise à mort de douze otages népalais par le groupe islamiste irakien Ansar Al-Sunna, proche d'Al-Qaida. Cette annonce provoque, le lendemain, à Katmandou, des émeutes anti-musulmanes et des manifestations contre le gouvernement népalais.

Le 31 également, Dalil Boubakeur organise à la Mosquée de Paris, dont il est le recteur, une séance très médiatisée de prière pour la libération des otages français, en présence des familles de ces derniers, des membres du Conseil français du culte musulman et de responsables politiques.

—  ENCYCLOPÆDIA UNIVERSALIS

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