2-16 septembre 1996
Irak. Reprise de contrôle du Kurdistan par Bagdad malgré les bombardements américains
Le 2, les forces de Bagdad amorcent leur retrait de la région d'Erbil, dans le Kurdistan, à l'intérieur de la « zone d'exclusion aérienne » créée par les alliés occidentaux en avril 1991, au lendemain de la guerre du Golfe. Elles y avaient pénétré à la fin du mois d'août pour appuyer les troupes du Parti démocratique du Kurdistan (P.D.K.) dans leur offensive contre les positions de l'Union patriotique du Kurdistan (U.P.K.). Bagdad avait justifié son intervention « limitée » au nord du 36e parallèle par la nécessité de défendre « la sécurité et la souveraineté de l'Irak » face aux manœuvres de l'Iran, qui soutient l'U.P.K. Alors que la sécurité irakienne poursuit la répression contre les opposants arabes au régime du président Hussein, qui étaient réfugiés dans le Kurdistan, l'armée irakienne et le P.D.K. reportent leur pression sur la région de Souleymanieh, toujours dans le Kurdistan, mais au sud du 36e parallèle, où les troupes de l'U.P.K. se sont repliées.
Le 3, en réaction à la provocation que représente à leurs yeux l'opération irakienne dans le Kurdistan, les États-Unis bombardent des installations militaires près de Bagdad et dans le sud du pays. Seules l'O.T.A.N. et la Grande-Bretagne apportent leur soutien à l'initiative américaine qui est destinée, selon Washington, à préserver « la sécurité et la stabilité de la région ainsi que la libre circulation du pétrole dans le monde ». La France, l'Union européenne, la Turquie, la Russie et les pays arabes, notamment, émettent des réserves quant au respect de la légalité internationale par les États-Unis. Ces derniers s'appuient sur la résolution 688 de l'O.N.U. d'avril 1991 relative à la protection des populations civiles irakiennes.
Le 4, les forces américaines procèdent à de nouveaux tirs de missiles de croisière sur le sud de l'Irak. Washington étend unilatéralement du 32e au 33e parallèle la limite de la zone d'exclusion aérienne créée par les alliés dans le sud de l'Irak en août 1992. Le président américain Bill Clinton déclare que l'opération « a atteint [ses] objectifs », le président irakien étant prévenu qu'il y a « un prix à payer à franchir la ligne jaune ».
Le 5, Paris annonce qu'il refuse d'étendre au-delà du 32e parallèle sa participation, aux côtés de Washington et de Londres, à la mission de surveillance aérienne du sud de l'Irak.
Le 7, la presse américaine révèle l'échec d'une opération de la C.I.A. lancée en mai 1991, qui aurait visé à aider des opposants irakiens réfugiés dans le Kurdistan à renverser Saddam Hussein. Le 9, le président Clinton déclarera que tout est tenté pour faire sortir d'Irak « tous ceux qui ont travaillé avec nous ». L'évacuation de quelque deux mille cinq cents collaborateurs, kurdes pour la plupart, commencera le 15.
Le 8, la Maison-Blanche annonce que les États-Unis n'interviendront pas dans la « guerre civile » kurde.
Le 9, le P.D.K. conquiert Souleymanieh. Jalal Talabani, chef de l'U.P.K., se réfugie en Iran. Massoud Barzani, chef du P.D.K., décrète une amnistie en faveur de ses adversaires et promet des élections générales. Cette victoire permet aux alliés de Bagdad de contrôler tout le Kurdistan irakien.
Le 10, le président Hussein lève l'ensemble des sanctions imposées par Bagdad au Kurdistan. Le 13, Bagdad exclura de l'amnistie proclamée en faveur des Kurdes ceux d'entre eux qui ont travaillé pour des organisations non gouvernementales ou des associations humanitaires.
Les 11 et 12, l'Irak tire des missiles contre des avions américains patrouillant à l'intérieur des zones d'exclusion aérienne que Saddam Hussein a demandé à son armée de ne plus respecter. Les États-Unis dépêchent des renforts dans la région. Cette escalade provoque une hausse des cours du pétrole qui atteignent le niveau enregistré lors de la guerre du Golfe.
Le 13, Bagdad annonce la suspension de ses attaques contre les avions américains.
Le 15, Washington exige de Bagdad qu'il démantèle ses installations militaires – rampes de missiles et stations radars – au sud du 33e parallèle en menaçant de les détruire en cas de refus.
Le 16, après avoir constaté l'absence de soutien des pays du Golfe et de la Turquie à ses projets de frappe sur l'Irak, le président Clinton affirme qu'il ne recherche « aucun affrontement avec Saddam Hussein », mais souhaite seulement « limiter sa capacité à menacer ses voisins ».