2-24 janvier 1991
U.R.S.S.. Épreuve de force entre l'armée et les nationalistes dans les pays baltes
Le 2, les « bérets noirs » des troupes spéciales du ministère soviétique de l'Intérieur (O.M.O.N.) investissent l'imprimerie du P.C. letton, à Riga. Ce coup de force intervient deux semaines après la menace de Mikhaïl Gorbatchev d'imposer directement l'administration présidentielle aux républiques rebelles, dont les trois États baltes, qui ont tous proclamé unilatéralement leur indépendance au printemps de 1990. Le même jour, l'armée soviétique chasse également la police lituanienne de deux bâtiments du P.C. à Vilnius.
Le 7, Moscou annonce l'envoi d'unités de parachutistes dans plusieurs républiques périphériques, dont les pays baltes, officiellement pour contraindre les conscrits réfractaires à rejoindre l'armée soviétique.
Le 8, Kazimiera Prunskiene présente la démission du gouvernement lituanien, le Parlement ayant décidé, sous la pression de manifestants prosoviétiques – les « pieds-rouges » anti-indépendantistes – de suspendre une hausse des prix de 200 à 800 p. 100 qu'elle estimait nécessaire à l'alignement de l'économie lituanienne sur les économies occidentales.
Le 10, Mikhaïl Gorbatchev somme le Parlement lituanien de rétablir l'ancienne constitution et laisse planer la menace d'une administration présidentielle directe en cas de refus de ce que le président Landsbergis qualifie d'« ultimatum ». C'est dans ce contexte troublé qu'Albertas Simenas est désigné pour former le nouveau gouvernement lituanien.
Le 11, des blindés prennent position dans les rues de Vilnius, où les parachutistes soviétiques investissent le ministère lituanien de la Défense, ainsi que l'imprimerie d'où sortent tous les journaux de la capitale.
Le 13, l'armée prend d'assaut de nouveaux bâtiments publics à Vilnius, mais se heurte cette fois à la résistance des volontaires lituaniens et de la foule qui entoure la tour de la télévision : quinze personnes sont tuées et cent vingt blessées, certaines ayant été écrasées par des chars. Un assaut contre le Parlement, où les dirigeants nationalistes sont retranchés, est évité de peu. Les Occidentaux s'indignent de cette première effusion de sang depuis deux ans d'agitation balte, tandis que Mikhaïl Gorbatchev rejette, en déclarant ne rien avoir su de l'attaque, la responsabilité du coup de force sur les autorités locales.
Le 15, l'inquiétude gagne la Lettonie. Des centaines de milliers de manifestants défilent dans les rues de Riga pour clamer leur détermination face à une éventuelle intervention soviétique, qui semble d'autant plus à craindre que les troupes continuent d'être renforcées en Lituanie.
Le 16, les funérailles nationales des victimes de l'attaque du 13 réunissent au moins deux cent mille personnes à Vilnius.
Le 20, à Riga, les bérets noirs donnent l'assaut au ministère letton de l'Intérieur, tuant cinq personnes et en blessant neuf autres. Une fois encore, Moscou déclare n'avoir rien su de l'attaque qui provoque les protestations officielles des États-Unis, de la Grande-Bretagne et du Japon, tandis que plus de trois cent mille personnes manifestent à Moscou en réclamant la démission de Mikhaïl Gorbatchev.
Le 22, au cours d'une conférence de presse, le chef de l'État soviétique rejette toute responsabilité dans les événements de Vilnius et de Riga, et présente ses condoléances aux familles des victimes. Il reçoit également le président letton, Anatolis Gorbunovs, accompagné de son Premier ministre Ivars Godmanis et leur déclare ne pas envisager l'instauration du pouvoir présidentiel dans les républiques baltes. Ces propos apaisants font un peu retomber la tension, mais les nationalistes baltes restent retranchés dans et autour de leur Parlement respectif, en particulier à Vilnius où des systèmes de protection impressionnants sont dressés.