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2-28 février 2022

Ukraine - Russie. Offensive militaire russe en Ukraine

Le 2, Washington annonce le redéploiement de quelque deux mille sept cents soldats vers la Pologne et la Roumanie, dans le contexte de crise lié aux pressions militaires exercées par la Russie sur la frontière ukrainienne. Le même jour, le quotidien espagnol El País révèle la teneur de la réponse écrite apportée par Washington, fin janvier, aux exigences russes de renoncement à tout élargissement de l’OTAN vers l’est et de retrait des forces de l’Alliance atlantique déployées dans les pays ayant adhéré à l’OTAN après 1997. Rejetant les exigences de la Russie, les États-Unis se sont toutefois dit prêts à envisager « des arrangements ou des accords » bilatéraux, notamment sur le déploiement de forces et d’armement en Ukraine, et à discuter du principe, adopté par l’Organisation pour la sécurité et de la coopération en Europe (OSCE) en décembre 2010, de « sécurité indivisible » qui veut qu’un État n’accroisse pas sa sécurité au détriment d’un autre. Washington s’est également dit favorable à des mesures de transparence, vis-à-vis de la Russie, sur les exercices militaires et les systèmes de défense balistique, ainsi qu’à la poursuite des discussions bilatérales sur la réduction des armements nucléaires stratégiques et non stratégiques.

Vladimir Poutine et Emmanuel Macron au Kremlin, 2022 - crédits : Kremlin Press Office/ Anadolu Agency/ Anadolu Agency/ AFP

Vladimir Poutine et Emmanuel Macron au Kremlin, 2022

Le 7, le président français Emmanuel Macron se rend à Moscou où il s’entretient avec le président russe Vladimir Poutine. Il défend la priorité d’une « désescalade » militaire à la frontière ukrainienne, propose une limitation des activités militaires en Europe et promeut le déblocage de la mise en œuvre des accords de Minsk II de février 2015 relatifs à la crise dans le Donbass. « Il n’y a pas de sécurité pour les Européens s’il n’y a pas de sécurité pour la Russie », affirme-t-il.

Le 8, à Kiev, où il rencontre le président ukrainien Volodymyr Zelensky, Emmanuel Macron se défend de prôner une « finlandisation » de l’Ukraine, en référence à la neutralité imposée par l’URSS à la Finlande, pendant la guerre froide, en échange de la préservation de la souveraineté nationale de cette dernière. 

Le 10, les armées russe et biélorusse lancent une vaste campagne de manœuvres militaires en Biélorussie. Le 12, la marine russe commencera des manœuvres en mer Noire.

Le 10 également, le président américain Joe Biden, continuant à constater la menace russe, appelle ses concitoyens à quitter l’Ukraine « maintenant ». De nombreux États agiront de même.

Le 11, la Maison-Blanche met en garde contre une invasion « imminente » de l’Ukraine par la Russie, redoutant « la création d’un prétexte » par Moscou. Elle annonce le déploiement de trois mille soldats supplémentaires en Pologne.

Le 15, les agences russes font état d’informations du ministère de la Défense annonçant un retrait d’une partie des forces russes stationnées le long de la frontière ukrainienne. Le lendemain, Washington comme l’OTAN constateront, au contraire, un renforcement de ces forces à la frontière.

Le 15 également, la Douma adopte une résolution appelant le Kremlin à reconnaître l’indépendance des deux « républiques » séparatistes prorusses de Donetsk et de Louhansk situées dans le Donbass, dans l’est de l’Ukraine.

Le 15 toujours, le chancelier allemand Olaf Scholz rencontre Vladimir Poutine au Kremlin. « Pour les Européens, il est clair qu’il ne peut y avoir de sécurité durable contre la Russie », affirme-t-il.

Le 16, l’OTAN annonce un renforcement de la présence de ses forces aux frontières orientales de sa zone.

Le 17, le ministère russe des Affaires étrangères répond aux contre-propositions américaines relatives à ses exigences en menaçant de recourir à « la mise en œuvre de mesures à caractère militaire et technique » et en demandant « le retrait de toutes les forces et armements des États-Unis déployés en Europe centrale et orientale, et en Europe du Sud-Est et dans les pays Baltes ».

Le 17 également, le Donbass est le théâtre de nouvelles tensions, caractérisées par une recrudescence des combats et des bombardements sur la ligne de front.

Du 18 au 20, la Russie est absente du forum annuel de la Conférence sur la sécurité de Munich, pour la première fois depuis 1998. Les participants, parmi lesquels la vice-présidente américaine Kamala Harris et Volodymyr Zelensky, évoquent les sanctions « massives » promises à la Russie en cas d’invasion de l’Ukraine.

Le 19, les autorités séparatistes des « républiques » de Donetsk et de Louhansk appellent à la « mobilisation générale » tout en mettant en scène l’évacuation de la population vers la Russie.

Le 21, à l’issue d’entretiens téléphoniques avec Vladimir Poutine et Joe Biden, Emmanuel Macron annonce la conclusion d’un accord de principe en vue d’un sommet entre les présidents russe et américain, que le Kremlin ne confirme toutefois pas. Quelques heures plus tard, Vladimir Poutine prononce un discours dans lequel il présente l’Ukraine comme « une partie inaliénable de notre histoire », « entièrement et complètement créée par la Russie […] bolchévique », et annonce la reconnaissance par Moscou de l’indépendance des « républiques » de Donetsk et Louhansk, ainsi que l’envoi dans celles-ci de troupes russes chargées du « maintien de la paix ». Il accuse les Occidentaux d’être responsables de l’échec des accords de Minsk et d’avoir « pour seul but d’empêcher le développement de la Russie ». Le président russe intime à l’Ukraine de cesser « ses opérations militaires » dans le Donbass.

Le 22, Berlin annonce la suspension de la procédure de certification du gazoduc Nord Stream 2 qui devait acheminer le gaz russe vers l’Europe, via l’Allemagne. De leur côté, Washington, l’Union européenne (UE) et le Royaume-Uni adoptent des premières sanctions financières contre des personnalités et des entités russes.

Soldats ukrainiens partant au combat, 2022 - crédits : Anatolii Stepanov/ AFP

Soldats ukrainiens partant au combat, 2022

Le 24, dans une allocution qui aurait été enregistrée dès le 21, Vladimir Poutine annonce le lancement d’une « opération militaire spéciale » en Ukraine, destinée à « protéger les personnes qui, depuis huit ans, sont victimes d’intimidation et de génocide de la part du régime de Kiev ». Il indique son intention pour cela « de démilitariser et de dénazifier l’Ukraine » et prévient que « quiconque entend se mettre sur notre chemin ou menacer notre pays et notre peuple doit savoir que la réponse russe sera immédiate et aura des conséquences jamais vues dans son histoire ». Les aéroports d’une douzaine de villes et des sites militaires ukrainiens, dont des aérodromes, sont aussitôt la cible de frappes aériennes russes, tandis que des blindés pénètrent en Ukraine depuis la Russie, la Biélorussie et la Crimée. Dans la soirée, les troupes russes s’emparent de la centrale nucléaire de Tchernobyl, dans le nord-ouest du pays. Volodymyr Zelensky proclame la loi martiale. Les États-Unis étendent leurs sanctions aux activités financières de grandes banques et entreprises russes, ainsi qu’à d’autres responsables russes. Les sanctions supplémentaires décrétées par l’UE visent également de nouvelles personnalités, ainsi que les exportations de technologies sensibles, l’accès aux marchés de capitaux et les secteurs de l’énergie, du raffinage, de l’aviation et des banques. Les cours des matières premières s’envolent, notamment ceux du blé et du pétrole – le baril de brent franchit le seuil des 100 dollars pour la première fois depuis 2014.

Le 24 également, l’opposante biélorusse en exil Svetlana Tikhanovskaïa accuse le président Alexandre Loukachenko de « haute trahison » pour avoir accepté que des troupes russes envahissent l’Ukraine à partir du territoire de la Biélorussie. Elle annonce la formation d’un gouvernement en exil, déclarant assumer « la responsabilité de représenter le peuple et la république de Biélorussie ».

Le 25, la résistance de l’armée ukrainienne freine la progression des forces russes. Volodymyr Zelensky décrète la mobilisation générale pour quatre-vingt-dix jours, tandis que des dizaines de milliers d’Ukrainiens quittent leur foyer et des milliers d’autres tentent de fuir le pays.

Le 25 également, la Russie oppose son veto au projet de résolution du Conseil de sécurité de l’ONU qui « déplore » l’agression de l’Ukraine par la Russie – onze États votent pour, la Chine, l’Inde et les Émirats arabes unis s’abstiennent. La Chine, qui a renforcé son partenariat stratégique avec la Russie à l’occasion de la rencontre des présidents des deux pays lors de l’ouverture des jeux Olympiques de Pékin le 4, affirme « comprendre » la Russie, tout en rappelant son respect des notions de souveraineté et d’intégrité territoriale. Les sanctions européennes, américaines et britanniques s’étendent au gel des avoirs en Europe de Vladimir Poutine et de son ministre des Affaires étrangères Sergueï Lavrov.

Le 25 toujours, le Conseil de l’Europe décide de suspendre la Russie de ses rangs.

Le 26, l’UE, les États-Unis et le Royaume-Uni annoncent un renforcement supplémentaire de leurs sanctions contre la Russie, en projetant d’exclure de nombreuses banques russes du système international de communication interbancaire SWIFT et de geler les réserves à l’étranger de la Banque centrale russe afin de l’empêcher d’intervenir sur les marchés pour soutenir le rouble, dont le cours s’effondre.

Les 26 et 27, des centaines de milliers de personnes manifestent dans de nombreuses capitales occidentales pour exprimer leur soutien à l’Ukraine.

Le 27, la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen annonce le déblocage d’une enveloppe de 450 millions d’euros pour fournir une aide militaire, et notamment des armes létales, à l’Ukraine, ainsi que d’une somme de 50 millions d’euros pour la fourniture de carburant, de matériels de protection et d’une aide médicale. Cette décision sans précédent doit notamment permettre de rembourser les États européens qui ont déjà fourni du matériel militaire à Kiev. Ursula von der Leyen annonce également la fermeture de l’espace aérien européen aux compagnies russes, ainsi que l’interdiction des activités en Europe de la chaîne russe RT et de l’agence multimédia russe Sputnik. Ce même jour, la compagnie pétrolière britannique BP est l’une des premières grandes sociétés occidentales à affirmer son intention de quitter la Russie, annonçant son retrait du capital du pétrolier russe Rostnef dont elle détient une participation de près de 20 %.

Le 27 également, Vladimir Poutine annonce « mettre les forces de dissuasion de l’armée en régime spécial d’alerte au combat ». Le même jour, des missiles russes endommagent le site d’une installation de stockage de déchets radioactifs à Kiev, sans toutefois provoquer de rejet de matières radioactives.

Le 27 toujours, les électeurs biélorusses approuvent par référendum une révision constitutionnelle qui abolit notamment l’interdiction d’installer des armes nucléaires sur leur territoire.

Le 27 encore, le chancelier allemand Olaf Scholz annonce devant le Bundestag son intention d’augmenter les dépenses militaires, opérant ainsi un revirement par rapport à la position traditionnellement défendue par le Parti social-démocrate (SPD). En plus d’un apport immédiat de 100 milliards d’euros, il promet une augmentation régulière du budget de la Défense de façon à ce que celui-ci atteigne « plus de 2 % » du PIB.

Le 28 se déroule une première cession de négociations entre des délégations russe et ukrainienne à la frontière entre la Biélorussie et l’Ukraine, en vue de l’instauration d’un cessez-le-feu.

Le 28 également, la Turquie annonce la fermeture des détroits du Bosphore et des Dardanelles aux navires de guerre, en application de la convention de Montreux de juillet 1936 qui lui permet de prendre une telle mesure en temps de guerre.

Le 28 toujours, la Fédération internationale de football association (FIFA) et l’Union européenne des associations de football (UEFA) décident d’exclure la sélection nationale et les clubs russes de toutes les compétitions jusqu’à nouvel ordre.

—  ENCYCLOPÆDIA UNIVERSALIS

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