2-28 mai 1997
France. Victoire de l'opposition de gauche au premier tour des élections législatives
Le 2, le Parti socialiste (P.S.) rend public son programme en vue des élections législatives anticipées convoquées par le président Chirac en avril. Intitulé Changeons d'avenir, changeons de majorité, ce programme propose « un choix de civilisation » qui consiste à « remettre l'Homme au centre de l'économie ; [à] remettre la France en marche : en créant des emplois, en diminuant la durée du travail, en rendant du pouvoir d'achat aux Français ; [à] reconquérir l'avenir : par la priorité à l'éducation, à la recherche, à la culture, à la santé, à, l'environnement ». Le document prévoit expressément la suppression des lois Pasqua-Debré relatives à l'immigration. Concernant la construction européenne, le programme socialiste pose quatre conditions à l'union monétaire : la participation de tous les grands pays européens, notamment l'Italie et l'Espagne ; l'établissement d'un « pacte de solidarité et de croissance » en faveur de l'emploi et du progrès social ; la création d'un gouvernement économique européen au côté de la Banque centrale européenne ; la définition d'une parité équilibrée entre l'euro, le dollar et le yen. Enfin, le programme socialiste s'engage en faveur de l'indépendance de la justice à l'égard du politique, de la réduction de la durée des mandats électifs, de l'interdiction des cumuls, de la parité hommes-femmes en politique.
Le 7, jour anniversaire de l'élection de Jacques Chirac à la présidence, l'Élysée fait diffuser dans plusieurs quotidiens régionaux une tribune du chef de l'État intitulée Un élan partagé, dans laquelle celui-ci critique le bilan et le programme socialistes, auxquels il oppose la poursuite de « l'ouvrage [...] engagé ensemble... ».
Le 9, Lionel Jospin, premier secrétaire du P.S., adresse à son tour un texte aux quotidiens régionaux. Déclarant assumer « les erreurs passées », il affirme que le retour de la confiance des Français dans leurs dirigeants est « une question de respect ».
Le 20, dans une déclaration prononcée à l'occasion de sa rencontre, à Paris, avec le chancelier allemand Helmut Kohl, le président Chirac met en garde les électeurs contre les effets d'une éventuelle cohabitation en affirmant que la France « ne pourra défendre ses intérêts [en Europe] que si elle est capable de parler d'une seule voix ».
Le 25, lors du premier tour des élections législatives, l'opposition de gauche devance largement la majorité parlementaire, qui réalise son plus mauvais score depuis le début de la Ve République. La gauche (Verts non compris) obtient 37,72 p. 100 des suffrages – dont 23,53 p. 100 pour le Parti socialiste (+ 5,94 p. 100 par rapport au premier tour des élections de mars 1993), 9,94 p. 100 pour le Parti communiste (+ 0,76 p. 100), 1,45 p. 100 pour le Parti radical-socialiste et 2,80 p. 100 pour les divers gauche dont le Mouvement des citoyens –, contre 36,52 p. 100 pour la droite – dont 15,70 p. 100 pour le Rassemblement pour la République (R.P.R. ; — 4,69 p. 100), 14,22 p. 100 pour l'Union pour la démocratie française (U.D.F. ; — 4,86 p. 100) et 6,6 p. 100 pour les divers droite dont la Droite indépendante. L'extrême droite obtient 15,04 p. 100 des voix – dont 14,94 p. 100 pour le Front national (+ 2,53 p. 100) –, et l'extrême gauche 2,52 p. 100 (+ 0,75 p. 100). Les écologistes enregistrent 6,81 p. 100 des suffrages dont plus de la moitié pour les Verts. Le taux d'abstention par rapport aux inscrits s'élève à 32,08 p. 100, et la proportion de bulletins blancs et nuls par rapport aux suffrages exprimés à 4,89 p. 100.
Le 26, à l'issue d'un entretien avec le président Chirac, Alain Juppé, qui dirigeait la campagne de la majorité avec François Léotard, président de l'U.D.F., annonce qu'il quittera son poste de Premier ministre après le second tour.
Le 27, dans un discours radiotélévisé, le président Chirac affirme avoir « bien entendu [le] message » du premier tour. Il engage les Français à ne pas « remettre en selle les idées socialistes d'hier » et à « choisir une autre voie, [...] moderne et humaine ». Il évoque la nécessité d'« inventer une nouvelle méthode de gouvernement, plus proche des Français », de « concilier la liberté, qui est l'oxygène de la santé économique, et la solidarité » et de ne pas « fragiliser la construction européenne », qui doit se donner une « ambition sociale ». Il justifie une fois de plus la dissolution de l'Assemblée en affirmant sa volonté de « ressaisir l'énergie nationale, [...] pour donner à la nation une force qui s'échappait ».
Le 28, lors d'une réunion électorale à Chambéry (Savoie), Philippe Séguin (R.P.R.) et Alain Madelin (U.D.F.-P.R.), les deux inspirateurs de la campagne présidentielle de Jacques Chirac, pressentis respectivement comme Premier ministre et ministre de l'Économie en cas de victoire de la droite, soulignent leur « complémentarité ».