2-29 janvier 1992
Algérie. Démission du président Chadli Bendjedid et interruption du processus électoral
Le 2, à Alger, trois cent mille personnes participent à une marche pacifique organisée par le Front des forces socialistes (F.F.S.) de Hocine Aït Ahmed « pour sauver la démocratie ». Le 26 décembre 1991, lors du premier tour des élections législatives, le Front islamique de salut (F.I.S.) avait obtenu près de 48 p. 100 des suffrages.
Le 3, trois cent quarante et un recours en violation de la loi électorale sont déposés devant le Conseil constitutionnel.
Le 11, cinq jours avant la date prévue pour le second tour, Chadli Bendjedid, président de la République depuis février 1979, présente sa démission au nom de l'« intérêt supérieur de la nation », en fait sous la pression de l'armée. Le Haut Conseil de sécurité (H.C.S.), composé du Premier ministre, Sid Ahmed Ghozali, des principaux ministres et des chefs militaires, prend en charge « l'ordre public ». Le président du Conseil constitutionnel, Abdelmalek Benhabilès, assure les fonctions de chef de l'État par intérim.
Le 12, le H.C.S. annonce la « suspension » du processus électoral. Le F.F.S. dénonce le « coup d'État ».
Le 13, le F.I.S. appelle « le peuple algérien à se préparer à toute éventualité » pour sauver le pays.
Le 14, le H.C.S. crée un Haut Comité d'État (H.C.E.) auquel il confie l'ensemble des pouvoirs du chef de l'État. Le H.C.E. doit rester en fonctions jusqu'en décembre 1993. Sa présidence est assurée par Mohamed Boudiaf, un des membres fondateurs du F.L.N. en 1954, qui vivait volontairement en exil au Maroc depuis 1964. Les autres membres du H.C.E. sont le général Khaled Nezzar, ministre de la Défense, Ali Haroun, ministre des Droits de l'homme, Ali Kafi, président de l'organisation des anciens moudjahidin, et Tedjini Haddam, recteur de la mosquée de Paris.
Le 16, le F.L.N., le F.F.S. et le F.I.S. – évincés de la vie politique par le nouveau pouvoir – se rencontrent.
Le 19, les cent quatre-vingt-huit candidats du F.I.S. élus au premier tour des législatives appellent à « la légalité constitutionnelle » et à la reprise du scrutin.
Le 22, sur plainte de l'armée, Abdelkader Hachani, principal dirigeant islamiste, est arrêté pour « incitation des soldats à la désertion ». Sept autres dirigeants du F.I.S., dont Abassi Madani et Ali Benhadj, sont déjà en détention. En outre, les autorités ont interdit tout rassemblement aux abords des mosquées.
Le 29, alors que les arrestations d'islamistes se multiplient, des heurts violents entre forces de l'ordre et intégristes font deux morts. Les troubles meurtriers se prolongent les jours suivants à Alger et en province.