20-24 novembre 2006
Rwanda. Mandats d'arrêt d'un juge français contre des proches du président Paul Kagame
Le 20, achevant son enquête sur l'attentat commis le 6 avril 1994 contre l'avion du président rwandais de l'époque Juvénal Habyarimana, le juge français Jean-Louis Bruguière annonce son intention de lancer neuf mandats d'arrêt internationaux pour assassinat et complicité à l'encontre de personnalités civiles et militaires proches de l'actuel président rwandais Paul Kagame. La flambée de violence qui avait suivi l'attentat avait abouti au massacre de cinq cent mille à un million de Tutsi ainsi que de Hutu modérés. Le magistrat avait été saisi en 1998 d'une plainte déposée par les parents des pilotes français de l'avion détruit. Il estime que, pour Paul Kagame, alors à la tête de la rébellion tutsi contre Kigali, l'« élimination physique du président Habyarimana [était] l'unique moyen de parvenir à ses fins politiques [...] et ce au prix du massacre des Tutsis dits „de l'intérieur“ ». Jouissant d'une immunité judiciaire en tant que chef d'État en exercice, l'actuel président rwandais, pourtant au centre de l'enquête menée par le magistrat français, ne pourrait faire l'objet d'une action que devant le Tribunal pénal international pour le Rwanda, installé à Arusha (Tanzanie).
Le 22, le président Kagame qualifie le juge Bruguière de « politicien », affirmant qu'« il aurait dû soulever la question de l'implication de la France dans le génocide des Tutsi ». Le pouvoir rwandais accuse notamment Paris d'avoir protégé les auteurs du génocide en créant au Rwanda, en juillet 1994, à la faveur de l'opération Turquoise, une « zone humanitaire » grâce à laquelle nombre de Hutu – alliés de la France – auraient pu fuir. En février 2005, six victimes rwandaises des violences de 1994 ont porté plainte, à Paris, contre des militaires français pour « complicité de génocide ».
Le 24, Kigali annonce sa décision de rompre ses relations diplomatiques avec Paris.