21-29 avril 1997
France. Dissolution de l'Assemblée nationale
Le 21, lors d'une allocution radiotélévisée, le président Chirac annonce sa décision de dissoudre l'Assemblée nationale. Les électeurs sont convoqués pour les 25 mai et 1er juin. La législature devait s'achever en mars 1998. Jacques Chirac n'avait pas dissous l'Assemblée, dominée par la majorité R.P.R.-U.D.F. depuis mars 1993, après son élection à la tête de l'État, en mai 1995. La dissolution interrompt l'examen par les députés du projet de loi sur la cohésion sociale qui devait contribuer à la résorption de la « fracture sociale » dont le candidat Chirac avait fait l'un des principaux thèmes de sa campagne. Le chef de l'État justifie sa décision par le « besoin d'une majorité ressourcée et disposant du temps nécessaire à l'action ». Dressant un rapide bilan de l'action entreprise depuis son arrivée au pouvoir, il affirme qu'« il faut [...] aller plus loin sur le chemin des changements » et que, « pour réussir, la France a besoin d'un nouvel élan » qui ne peut être donné que par « l'adhésion, clairement exprimée, du peuple français ». Adhésion à la poursuite des réformes – baisse des dépenses publiques, lutte contre le chômage, adaptation du système éducatif et de la protection sociale, réforme de la justice ; adhésion aux décisions à prendre à l'échelle européenne – passage à la monnaie unique, réforme des institutions, élargissement de l'Union, réforme de l'Alliance atlantique, construction d'une Union « au service des hommes » ; adhésion enfin aux « valeurs qui fondent notre communauté nationale et donnent à la France son destin singulier [...] : le respect dû à chaque homme, la tolérance, la solidarité » – et qui sont mises en cause. Rejetant les solutions du « repli sur nous-mêmes », du « laisser-faire, laisser-aller », du « “toujours plus” d'État », Jacques Chirac défend « l'idéal de notre République [...] : des droits farouchement défendus, et d'abord le droit à la dignité et à la protection » ; « des devoirs et des responsabilités assumés » ; « une cohésion sociale renforcée [...] par le dialogue et la concertation » ; « une morale politique retrouvée avec des dirigeants qui donnent l'exemple » ; « une vie politique modernisée donnant toute leur place aux femmes et où les élus se consacrent pleinement à leurs fonctions » ; « une France laïque, respectueuse des croyances de chacun ». Le premier secrétaire du Parti socialiste, Lionel Jospin, estime que « la droite et, au premier chef, le Premier ministre, Alain Juppé, veulent faire voter les Français avant que se confirment trois événements : l'échec aggravé de la politique économique du gouvernement, son intention de recourir à une nouvelle cure d'austérité, le développement des “affaires” le concernant ». Il affirme que « l'élection qui vient sera l'occasion d'un choix politique, mais aussi d'un choix de société, [...] d'un choix de civilisation ». « Pourquoi, s'interroge-t-il, dériver vers un modèle anglo-saxon, mondialisé et inégalitaire » [qu'il qualifie de « capitalisme dur », plutôt que de] « reconstruire l'équilibre économique et social français dans l'engagement européen? »
Le 22, dans un discours-programme prononcé devant les élus de la majorité, Alain Juppé annonce la poursuite de la politique engagée par le gouvernement en refusant tout « tournant libéral ».
Le 26, tandis que le président de l'Assemblée nationale sortante, Philippe Séguin, et l'ancien ministre ultralibéral Alain Madelin prennent leurs distances à l'égard de la politique gouvernementale, l'ancien ministre de l'Intérieur Charles Pasqua estime que la campagne menée par le Premier ministre n'est pas « à la hauteur de l'enjeu » et prône une « nouvelle politique ».
Le 27, Alain Juppé présente un programme pour les « quarante premiers jours » de la future législature tout en affirmant qu'il n'est « absolument pas » candidat à sa propre succession.
Le 29, Alain Juppé, président du R.P.R., et François Léotard, président de l'U.D.F., présentent le programme commun de la majorité qui s'articule autour de quatre thèmes : « un État efficace au service du citoyen », « libérer l'initiative au service de l'emploi », « rénover notre pacte social pour mieux protéger » et « faire de la France le moteur d'une Europe proche du citoyen ».
Le 29 également, au terme de négociations engagées en décembre 1996, les Partis socialiste et communiste signent une « déclaration d'intention » commune. Ceux-ci s'engagent notamment en faveur de la relance de la consommation, de la création de sept cent mille emplois pour les jeunes, de la réduction à trente-cinq heures de la durée hebdomadaire du travail, de l'arrêt des privatisations, du rééquilibrage des pouvoirs en faveur du Parlement, de la limitation du cumul des mandats et de l'encouragement de la représentation des femmes dans la vie politique, de la substitution d'une autre politique de l'immigration aux lois Pasqua et Debré. Constatant leurs « positions respectives » sur l'Union européenne, ils se déclarent prêts à « redonner du sens à l'Europe en dépassant le traité de Maastricht ».