21 mars-2 avril 1993
France. Victoire de l'opposition aux législatives, Édouard Balladur Premier ministre, Philippe Séguin président de l'Assemblée nationale
Le 21, le premier tour des élections législatives est marqué par la sévère défaite de la majorité présidentielle au profit de l'opposition regroupée au sein de l'Union pour la France (U.P.F.). La majorité présidentielle obtient 20,27 p. 100 des voix (— 17,25 p. 100 par rapport au premier tour des élections législatives de juin 1988), dont 17,59 p. 100 (— 17,17 p. 100 pour le Parti socialiste (P.S.). L'U.P.F. remporte 39,47 p. 100 (+ 1,8 p. 100) des suffrages, dont 20,39 p. 100 (+ 1,21 p. 100) pour le Rassemblement pour la République (R.P.R.) et 19,08 p. 100 (+ 0,59 p. 100) pour l'Union pour la démocratie française (U.D.F.), auxquels il convient d'ajouter les 4,71 p. 100 (+ 1,86 p. 100) de voix en faveur des candidats divers droite. Aucun bastion traditionnel de la gauche n'est épargné, et aucun de ses candidats n'est élu au premier tour. La majorité subit les effets de l'usure du pouvoir, de l'augmentation du taux de chômage – la barre symbolique des trois millions de chômeurs en données corrigées est dépassée au mois de février –, d'une conjoncture économique internationale défavorable, et des « affaires ». Dotée d'un programme très prudent, l'opposition bénéficie de l'effet d'alternance. La principale surprise du scrutin réside dans le faible score réalisé par les écologistes, comparé aux chiffres des intentions de vote. Ceux-ci ne recueillent que 7,63 p. 100 (+ 7,28 p. 100) des voix, dont 3,62 p. 100 pour Génération écologie et 4,01 p. 100 pour les Verts. Le Front national (F.N.) progresse, avec 12,41 p. 100 des suffrages (+ 2,76 p. 100). Le Parti communiste (P.C.F.) est en recul, avec 9,18 p. 100 des voix (— 2,14 p. 100). Le taux d'abstention est de 31,07 p. 100.
Le 23, Jacques Chirac (R.P.R.) prône la démission du président François Mitterrand.
Le 24, ce dernier réaffirme fermement sa volonté d'achever son mandat et menace de choisir le futur Premier ministre ailleurs que dans les rangs du R.P.R.
Le 26, Édouard Balladur assure que la nouvelle majorité « respectera les responsabilités et les pouvoirs de toutes les institutions ».
Le 28, au terme du second tour, l'U.P.F. remporte quatre cent quatre-vingt-quatre sièges (+ 216) sur cinq cent soixante-dix-sept, dont deux cent quarante-sept (+ 121) pour le R.P.R. et deux cent treize (+ 82) pour l'U.D.F. Les candidats divers droite totalisent, vingt-quatre sièges (+ 13). Cette majorité de plus des trois quarts des sièges est la plus forte enregistrée depuis 1958. Bernard Stasi est la seule personnalité de l'U.P.F. à ne pas être réélue. L'ex-majorité présidentielle ne totalise que soixante-dix sièges (— 212), dont cinquante-quatre (— 198) pour le P.S. Avec vingt-trois élus (— 3), le P.C.F. sauve son groupe à l'Assemblée nationale, mais André Lajoinie, numéro deux du parti, n'est pas réélu. Les écologistes ne parviennent pas à entrer au Palais-Bourbon, et le F.N. perd le seul siège qu'il y détenait. Quinze membres du gouvernement – dont Roland Dumas, Michel Delebarre et Louis Mermaz – sont battus, ainsi que Michel Rocard et Lionel Jospin. Le Lot reste le seul département acquis à la gauche.
Le 29, François Mitterrand nomme Premier ministre Édouard Balladur, député R.P.R. de Paris, secrétaire général de l'Élysée sous la présidence de Georges Pompidou, ministre de l'Économie du gouvernement de Jacques Chirac entre 1986 et 1988, et européen convaincu. Le chef de l'État déclare qu'il veillera « à la continuité de [la] politique extérieure et de [la] politique de défense », que « l'Europe, la construction communautaire, l'unité progressive [du] continent doivent demeurer au premier rang [des] préoccupations », qu'il convient de préserver le système monétaire européen, la parité du franc avec le deutsche Mark, ainsi que l'« unité nationale » qui repose sur la « cohésion sociale du pays ».
Le 30, Édouard Balladur rend publique la composition de son gouvernement. Volontairement « restreint », celui-ci comprend vingt-neuf ministres, outre le premier d'entre eux, et aucun secrétaire d'État. Sa tonalité est centriste et européenne, et sa composition respecte l'équilibre entre le R.P.R. et l'U.D.F. Au premier rang des ministres d'État figure Simone Veil, ministre des Affaires sociales, de la Santé et de la Ville. Sont également nommés ministres d'État Charles Pasqua (R.P.R.), à l'Intérieur et à l'Aménagement du territoire, Pierre Méhaignerie (U.D.F.), garde des Sceaux, et François Léotard (U.D.F.), à la Défense. Alain Juppé (R.P.R.) est nommé aux Affaires étrangères, François Bayrou (U.D.F.) à l'Éducation nationale, Edmond Alphandéry (U.D.F.) à l'Économie, Gérard Longuet (U.D.F.) à l'Industrie, aux Postes et Télécommunications et au Commerce extérieur. Alain Madelin (U.D.F.) est nommé ministre des Entreprises et du Développement économique, chargé des P.M.E., du commerce et de l'artisanat. Nicolas Sarkozy, ministre du Budget, est également porte-parole du gouvernement.
Le 2 avril, Philippe Séguin, député R.P.R. des Vosges, est élu au second tour président de l'Assemblée nationale par trois cent quatre-vingt-neuf voix contre cinquante-neuf au candidat socialiste André Labarrère et vingt-six au candidat communiste Georges Hage. Au premier tour, il avait devancé Dominique Baudis (U.D.F.), par deux cent soixante-six voix contre cent quatre-vingts.